Des religieuses à l’école communale


Scaër a eu la particularité d’avoir eu à Cascadec d’une école privée d’entreprise  avec des enseignants dépendant de l’Éducation nationale. A l’inverse , il y eut au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, une école communale publique où enseignaient des religieuses.
 
 
1 =Les religieuses ont enseigné de 1858 à 1909 dans cette école publique. 2= Elles ont ouvert  une nouvelle école en 1909. ( carte postale Cim)

 

Des religieuses infirmières et institutrices

 1856 : une épidémie de dysenterie frappe la commune.A la demande du préfet, la communauté des filles du Saint Esprit affecta deux religieuses pour soigner les malades à Bannalec: elles intervinrent aussi à Scaër. Lors de leur départ fin 1856 Le sous-préfet de Quimperlé, émit le vœu que ces religieuses s'établissent durablement sur la commune. Ce sera le cas deux ans plus tard.
 
1858 - Fondation, par François de Kerjégu, d’un établissement destiné à l’enseignement au carrefour des actuelles rue Queignec et rue Laennec. Un bâtiment de cette école parallèle à la rue Laennec a été démolie mais il en subsiste l’immeuble réhabilité en HLM place du 8 mai. Mr de Kerjégu le légua à la commune, « à condition qu’il serait desservi par les Sœurs Blanches, dites Filles du Saint-Esprit ; ou à leur défaut par des Religieuses se dévouant à l’instruction des enfants et au soin des malades. » (archives FSE).  Sœur Saint Marcel (Jacquemine Pédron, de Plélo), qui dirigera la Maison de 1858 jusqu’à sa mort en 1892 à Scaër, où elle est inhumée. 


Au premier plan la seconde partie de l'école publique des filles, ouverte dans les années 1930. Au second plan à gauche, l'école privée des filles ( carte postale Lapie)

Une partie de l'école publique des filles est devenue un immeuble locatif

 
1885 – « Soeur Arsène-Joseph Barré, fille du Saint-Esprit, fait don aux Sœurs de Scaër d’un champ situé près de leur établissement et d’une contenance de 66 ares 68, dans lequel la communauté a construit, à ses frais, une école maternelle avec toutes ses dépendances ». Elle accueillait les garçons et filles âgés de moins de 6 ans, en « salle d’asile ». Les salles d'asile, ou écoles du premier âge, sont des établissements charitables où les enfants des deux sexes peuvent être admis jusqu'à l'âge de six ans accomplis, pour recevoir les soins de surveillance maternelle et de première éducation que leur âge réclame. Cette école libre fut construite de l’autre côté du carrefour de la Croix de Mission, sur un terrain donné par une religieuse du Saint Esprit, « aux frais des religieuses de l’école communale ».
 
1900 – A la mort de Sœur Marie-Eliacim (arrivée à l’école communale en 1882, ayant reçu sa nomination officielle en 1884, décédée le 17 avril 1900 et inhumée à Scaër), « l’école fut sur le point d’être laïcisée. (…) mais grâce aux instances de Mr de Kerjégu, l'école communale  échappa à la laïcisation. Seulement le traitement de la Sœur défunte - 1006 F – fut complètement supprimé. La remplaçante – Sœur St Marc – a un traitement de 500 F, dont 250 F de la commune, et 250 F de Mr de Kerjégu. Les Sœurs de la 3è et de la 4è classe n’ont aucun traitement. » (archives FSE). En 1902, Emile Combes lança une politique d’expulsion des communautés religieuses, mais une enquête de l’évêché de Quimper daté du 31 octobre 1903 confirme qu’il y avait encore à cette date des religieuses à l’école communale des filles.
 

  S’ingénier pour exercer les enfants à réfléchir

 

 1896 – Sœur Marie-Alvarez, « Mère Visiteuse » - assurant, en plus de la visite réglementaire de la communauté au nom du Conseil général de la Congrégation, un rôle de conseillère pédagogique. Elle recommande aux Sœurs de « donner des soins particuliers à la lecture dans les classes élémentaires, de faire les enfants épeler et syllaber ensemble, de se servir du tableau noir pour démontrer et corriger l’écriture, de faire faire beaucoup d’exercices oraux aux élèves (11 juillet 1896) ».
La même, lors de sa visite du 1er au 5 juin 1901, signale qu’« il a été tenu compte des dernières recommandations faites en 1896 ».
Elle ajoute d’autres conseils : « Les maîtresses de la maternelle et de la 3è classe se serviront de bâtonnets pour enseigner la numération, et auront un tableau de nombres jusqu’à 100 au moins. Qu’elles n’opèrent jamais sur les nombres abstraits (…). S’ingénier pour exercer les enfants à réfléchir, à observer, à aller au fond des choses, (…) redoubler d’efforts pour inspirer aux élèves le goût des travaux manuels, pour les former à la piété, à un bon maintien, à la politesse ». (…) Elle recommande « d’avoir des petits bancs pour l’église, afin que les enfants ne s’agenouillent pas sur la pierre. »
Lors de la visite suivante de Sr Charles Borromée en 1905, celle-ci note encore que ces recommandations ont été suivies.
 
 1904 . La loi du 7 juillet prévoit  que « L'enseignement de tout ordre et de toute nature est interdit en France aux congrégations.Les congrégations autorisées à titre de congrégations exclusivement enseignantes seront supprimées dans un délai maximum de dix ans. Il en sera de même des congrégations et des établissements qui, bien qu'autorisés en vue de plusieurs objets, étaient, en fait, exclusivement voués à l'enseignement à la date du 1er janvier 1903. Les congrégations qui ont été autorisées et celles qui demandent à l'être, à la fois pour l'enseignement et pour d'autres objets, ne conservent le bénéfice de cette autorisation ou de cette instance d'autorisation que pour les services étrangers à l'enseignement prévus par leurs statuts ».  Les religieuses continuent toujours à enseigner dans l'école publique . 

 1909 :   Entrefilet de la dépêche de Brest en date du 5 mars : "M. le ministre a subventionné les projets de constructions scolaires ci-après : Scaër, acquisition de l'école de filles, 4.405 fr".
Du 3 au 9 juin : Visite de la « Mère Visiteuse » qui note que « les classes sont fréquentées par 247 enfants. On compte en outre une centaine d’enfants à l’Asile, et il y a 57 internes. Malheureusement, la laïcisation semble ne plus devoir tarder ». Elle sera effective le 1er octobre 1909.
 

Les Religieuses quittent l'école communale

 

Le 15 octobre 1909 : la communauté du Saint -Esprit ouvre  une nouvelle école libre pour les filles dans un local entièrement neuf, construit par Mr Le Duc, Curé de Scaër au carrefour des rues Jaurès et Curie (immeuble locatif HLM aujourd'hui). Elle se compose de quatre classes tenues par des demoiselles, et d’un pensionnat comptant 68 internes (pour 1910).   
 
 En juin 1911, l’école « est fréquentée, en ce mois, par 228 élèves et, au plus fort de l’année, par 250 ou 260. De ce nombre, 60 internes forment la pension de famille. La Salle d’Asile, qui existait en dehors des classes communales, n’a pas été fermée et fonctionne toujours par les bons soins de Soeur St Fernand, mais on s’attend à la voir fermée avant peu. Il y a en ce moment 86 enfants. (…) 15 élèves sur 18 ont obtenu le certificat d’Etudes ».

En 1913, l'école compte  5 classes primaires, 1 Cours Supérieur et une école maternelle. « Madame de la Ferronaye verse 400 F pour le traitement de chaque institutrice. Le pensionnat est au nom des Sœurs et compte 74 internes ». NB : En 1918, Mme la Marquise de la Ferronaye versera 800 F par trimestre.

1916 -  L’école est prospère. Elle compte 380 élèves, dont 85 internes (…) De nouvelles constructions s’imposent. La « Mère Visiteuse » conseille de reprendre – avec prudence cependant – la visite des malades. 
Vue panoramique des établissements scolaires du bourg en 1955. 1 : l'école publique des filles. 2 en :L'école publique des garçons en construction. 3: L'école privée des filles ( St Joseph). 4: L'école privée des garçons (St Alain). 5: l'école publique des garçons. A cette époque, chaque " école" accueillait des élèves du CP à la 3e. Les écoles des filles avaient en outre des classes maternelles.



1919 – Un « ouvroir de broderie fut installé par les soins de Mme la Marquise de Ferronaye. Il occupait une trentaine de jeunes filles lorsque survint la crise commerciale de 1921 ». Par suite de défection des directrices successives, cet ouvroir fut fermé en mai 1922. 
 
1922 – « Mr Bolloré fait don à l’établissement d’une baraque toute neuve, qui sert de réfectoire aux chambristes ( internes) ».
 
A partir de 1923, la surveillance se durcit de la part de l’inspection primaire : interdiction faite à la directrice de garder une Sœur (Sœur St Ernest, CP) dans son école, des enquêtes sont diligentées auprès des parents, des élèves séparément, du Curé, des voisins, … au sujet des liens entre la pension de famille et l’école ( A qui paie-t-on les fournitures ? et la pension ? …). Des comparutions ont lieu à Quimperlé, chez le Juge d’Instruction, qui n’arrive pas à démêler la situation. En 1926, le Curé lui-même est inculpé comme « directrice » de l’école et de la pension de famille, puis la Supérieure, … « Finalement, on nous a laissées tranquilles ! »


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Extrait des archives de l'évêché



1932 : l'école publique des filles va s'agrandir

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Sources  principales : Archives diocésaines, archives des filles du Saint Esprit (FSE)  et témoignages de Scaërois de souche.