Autrefois les vaches laitières avaient un nom : Blanchette , Noiraude…Aujourd’hui, les éleveurs les identifient le plus souvent via le N° de leur boucle, numéro qui leur est aussi accrédité sur l’ordinateur où est enregistré leur production laitière, leur état de santé..
Autrefois les agriculteurs connaissaient le nom des parcelles qu’ils exploitaient : parc bras, prat ar ster. Aujourd’hui, ils les repèrent sur le cadastre : section E parcelle 325. A cela plusieurs explications : la langue bretonne a régressé, les parcelles ont été agrandies et des noms ont disparu, les notaires ne transmettent plus nécessairement ces noms aux nouveaux exploitants…
Pourtant cette microtoponymie rurale, faisant référence au caractère très local des lieux désignés, est un patrimoine historique à transmettre. L’analyse des noms des terres labourables ou plantées, des vergers, coutils, prés, pâtures, taillis, futaie, landes sur l’état des sections du cadastre napoléonien de la commune terminé sur le terrain en 1828,sur les registres en 1829, est riche en informations .
Voici une petite étude se concentrant autour du bourg de Scaër. Les appellations retenues ont été classées selon leur catégorie.
Les noms des champs font référence
- à leur caractéristique
Parc
Moen= le champ étroit, parc bihan = le petit champ, prat ar poull= le
pré de la mare, parc tri C’horn= champ aux 3 côtés. Toul Louzet = le
trou boueux. Le Pontigou = les petits ponts (en face du garage Bouguennec). Parc ar ster :
le champ de la rivière. « Liors rosic banel »= le jardin de la venelle
aux champignons… » . Parc ar Lostic » = le champ du rossignol( eostig) ou
petite queue(lost).
- à la végétation
Prat an Ale fao= l’allée de hêtre près de l’école publique. Parc Déro= le champ aux chênes. Liorz ar guinis = le jardin à blé. Ar guestenn peut se traduire par « la châtaigneraie ». Parcou C’hoat = les champs du bois. Ar banalou bras : le grand champ où il y a des genêts. Parc ar foennec : le champ de foin. « Parc an aourec bras »= le grand champ doré. "Glazenn né" =le gazon neuf.
- à une personne :
Parc Mauricette, Jardin Mataou= le jardin de Mathurin. Prat Marie Daëron, parc an avocat, et parc ar commissaire dans l’actuel bois de la Source, parc ar sénéchal au nord de l’église .Prat person= le pré du curé, par an aotrou = le champ du patron à Kerzéré. Liors Annaïc à Coat Scaer Vras…
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- à leur emplacement
"Parc drenv an ti"= le champ derrière la maison. "Parc forn"= le champ du four. "Parc ar puñs"= le champ du puits," parc ar styvel"= le champ de la fontaine. "Parc leur" = le champ de l’aire à battre qui peut-être coz ou nevez , ancien et nouveau, si l’on a refait une aire à battre ou pas. « Parc ar Poulfanq » = le champ du trou de boue, à Coat-Courant. « Ar leur gwez »= la cour des arbres. « liors ar parcou munut »= jardin près des petits champs. Prat vammen= le pré de la source. Parc an enezen= le champ de l’île entre canal et Isole en bas de Kerisole. Goarem ar C’hardi = La garenne de l’abri de la charrette. Prat pont ar Gourret = le pré du pont de la pêcherie (bas du Grandchamp). L’actuelle place de la mairie est dénommée en français : « champ de foire » ; nature de la propriété : « pâture » : on ne peut plus logique.
En zone urbaine, autour des maisons, il y a de nombreux Liors (jardin) : "liors glas " pour jardin vert, "liors ar parcou munut"=le jardin des petits champs.
- à l’histoire
- Certains noms sont liés à l’histoire du lieu. Ainsi il y avait plusieurs « Parc ar Justissou » au carrefour de la rue Yannès et du chemin de Dour Gaon : sur la carte de Cassini (XVIIIE siècle) un gibet y est recensé.
- Il y a deux « liors Pen Pavé » près du cimetière et un « liors ar paveou », à l’angle de la rue Christophe Morvan près du pont de Payaou. C’est une référence à l’époque gallo-romaine où les entrées de bourg étaient marquées par quelques mètres de voie pavée. La voie romaine Riec- Carhaix traversait Scaër par les rue Turquet, de la Paix et de Kerjégu . Sept parcelles du quartier de Kervéguen sont dénommées " Hastellou" = Castrum : c'est le site d'un ancien camp-gallo-romain.
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- Un « Parc ar forn » est placé au bout de l’impasse de Penker Navellou,au pied de l’église Peut-être l’emplacement du four du village au Moyen Age.
- De part et d’autre de la rue Barbusse, au bas de la place de la mairie, il y avait un « liors ar Gouel» = le jardin de la fête et un « liors ar custum » = jardin de la coutume. Peut-être des sites à vocation sociale ou de rassemblement populaire ?
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- A Coat-Courant, il y avait une proximité de la rue Curie un parc an ilis= champ de l’église et un parc ar moustrenn = champ du monastère blanc. Pourquoi ces appellations : Y aurait-il eu des lieux de culte médiévaux dans ce quartier ? Dans le même quartier : « Parc an hent meur »= le champ en bordure de la grande route. « Meur » à la place de « Bras » pour signifier « Grand » : Ceci atteste une origine très ancienne à l’axe Scaër-Coray.
- A Coat Scaër Vian, il y avait un « Liors ar Vouden » = jardin de la motte féodale.
- Au Grandchamp, il y avait parc ar mengleuz = le champ de la carrière. C’est peut-être l’origine de l’excavation voisine du grand chêne ? Il y avait une parcelle éponyme dans le bois de la Source.
Cet exercice mériterait d'être développé sur les dizaines de milliers de microtoponymes de la commune recensés sur ce cadastre bicentenaire aux archives départementales .
Pour mieux connaître votre quartier il y a 200 ans, cliquez sur le lien ci-dessus. Puis ouvrez le tableau d'assemblage. Repérez la feuille du cadastre de votre quartier. Ouvrez-la pour trouver le lieu où vous habitez. Repérer les numéros des parcelles. Revenez ensuite sur la page d'accueil du cadastre pour explorer les registres "états de sections" afin de découvrir le nom des parcelles.