D'hier à demain, un siècle de démographie scaëroise

En 1995, Robert Boucher consacra quelques heures de sa paisible retraite à compulser les registres d'état civil à partir de 1900. Nous avons poursuivi cette démarche jusqu’à 2023. Ces données une fois traduites en une courbe nous informent sur l'évolution de la population locale depuis le début du siècle du 20e siècle.

Notre analyse  tente d’expliquer les variations et tendances sans prétendre être exhaustive, ni la seule interprétation possible. 

La population légale au 1er janvier 

 

 

Constatons d'abord que le nombre de décès annuels demeure dans une fourchette allant de 80 à 120 à l'exception de la période 1915-1918. Par contre, l'allure générale de la courbe des naissances est descendante, variant de 250 naissances au début du siècle à une cinquantaine et parfois moins, ces dernières années.

Naissances en bleu et décès en rouge . Moyenne au bout du graphique


Courbe des naissances

   On observera la chute vertigineuse entre 1915 et 1919 avec un premier « babyboom » dès 1920. Le solde naturel, différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès, fut négatif pour la première fois durant la Première Guerre mondiale. Par la suite le nombre de naissances n’égala jamais la période d’avant-guerre. Explications plausibles : les Scaërois décédés durant ce conflit n’ont pas eu de descendance ; début de l’exode rural massif vers l’Amérique et la région parisienne pour trouver un emploi.
Évidemment, du fait d’un nombre plus faible de naissances entre 1915 et 1919 dans toutes les communes, il y aura un déficit de naissances 20-25 ans après Entre 1941 et 1945, il y aura évidemment moins de naissances. Le babyboom d’après la Libération concerne la période 1946/1952.
 La chute du nombre de naissances s’est accélérée au milieu des années 60. Cela s'explique aisément par la diminution générale du nombre d'enfants par famille, de la diminution des familles agricoles, souvent des familles nombreuses et par le départ de Scaër des jeunes susceptibles d'être parents.
 Depuis 1971, les décès sont à nouveau plus nombreux que les naissances. Depuis 1976, la baisse du nombre de naissances est moins évidente. Il y a eu des années fastes : 67 naissances en 2009 mais aussi des années creuses : 28 naissances en 2016. Ces fluctuations ont eu des incidences sur les ouvertures et fermetures de classes dans les écoles. L’arrivée ou le départ de nouveaux couples peuvent en partie expliquer ces variations d’une année à l’autre.
L’effet « année 2000 » est à peine perceptible dans la commune.


Un solde naturel négatif depuis un demi-siècle
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 Courbe des décès.
  On notera bien entendu le nombre élevé de décès durant la première guerre mondiale. La pointe de 1921 : peut-être une incidence de la grippe espagnole ? Il y eut une autre pointe en 1929 mais également des points bas en 1937,1950. Depuis la création de l’Ehpad en 1968, les statistiques des décès incluent des résidents de communes extérieures. Le relative baisse de la fin du 20e siècle peut être en lien avec le nombre de naissances après la 1ère guerre mondiale.

Courbe des mariages

 Ils ont été moins nombreux durant les deux conflits mondiaux et suivis immédiatement d'une remontée en flèche en 1920 puis en 1946/47. Depuis  les années 70, la baisse du nombre de mariages est flagrante. Il y a eu un sursaut entre 1999 et 2001. Et seulement 7 mariages en 2020, 15 en 2021, 12 en 2022, 14 en 2023!  Les  Pactes civil de solidarité (PACS) sont du même ordre :18 PACS en 2020 2021 et 2022, 13 PACS en 2023.





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Le solde migratoire est positif

Le nombre d’habitants de la commune est en relation avec ces données démographiques : 6700 habitants en 1921, 7800 en 1943, 7500 en 1952, 6997 en 1966, 6721 en 1977, 6039 en 1982, 5557 en 1988. Le point bas : 5139 habitants en 2009. 

Le point haut fut vraisemblablement  atteint durant la seconde guerre :   " A noter que la population de la commune, augmentée des réfugiés et des troupes d'occupation atteint actuellement près de 9000 habitants".(extrait du conseil municipal du 10/10/1940, cité par Henri Gilles dans son  mémoire  de maîtrise sur Scaër). Il est possible que l'on ait approché "officieusement" les 10.000 habitants après l'arrivée des 400 collégiens et lycéens  brestois réfugiés à Saint Alain.

 Puis Scaër a perdu le tiers de sa population en 25 ans : un constat identique  est fait d'autres communes du Centre Bretagne.


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 Durant la dernière décennie, la situation s’est stabilisée et il y a un frémissement dans la croissance,  induit par l’arrivée de nouveaux résidents: des retraités en quête de quiétude mais aussi de quelques actifs séduits par les coûts modérés des logements en vente ou mis en location. Même si les équipements scolaires, culturels, sportifs... peuvent séduire les jeunes actifs, l'éloignement des emplois peut devenir un frein à leur installation sur la commune. D'autant plus que les rares créations d'emploi locales ne suffisent pas à retenir les 20- 40 ans !

Le solde migratoire positif arrive à  peine à compenser le solde naturel négatif. La population légale décroit à nouveau depuis 2019 où elle était de 5383 habitants, puis 5380 en 2020,5345 en 2021,5295 en 2022, 5245 en 2023,5223 en 2024.


La pyramide des âges de 2007 (sources INSEE)


2019: les 45-74 ans sont plus nombreux; les 30-44 ans moins nombreux



 

L'évolution de la  population en pourcentage

 

L'arrivée de nouveaux retraités ne compensent pas la diminution des actifs de 30-44 ans ( Source INSEE)

Depuis une décennie, les  tranches 0-14 ans, 15-29 ans et les 30-44 ans représentent un pourcentage moindre de la population scaëroise. C'est une des causes de la baisse du nombre de naissances et du départ des jeunes faute d'emplois en nombre suffisant sur la commune!
Le pourcentage des 60-74 ans augmente : arrivée de néo-retraités, conséquence du baby-boom de 1945 à 1960
 

 
Comparez l'évolution de la population  de 0 à 44 ans à celle des aînés .

L'essaim scaërois

 En commentaire à son étude sur la démographie, R. Boucher nous livrait en 1995 ces quelques lignes nostalgiques : « Vers 1950, c'était le temps où Cascadec avait 1.000 salariés, les fermes comptaient jusqu'à six commis. Le travail des artisans et des ouvriers, au bourg et dans les hameaux, battait son plein... La commune comptait 7.000 habitants y vivant et y travaillant. Les jours de foire, les dimanches et jours fériés, le bourg s'emplissait de la campagne. L'essaim scaërois bourdonnait dans sa ruche. Aujourd'hui, le constat est la diminution du nombre d'actifs, du nombre de scolaires... mais augmentation du nombre d'habitants retraités :  ils représentent aujourd'hui un bon tiers de la population ».

L'âme d'un pays

 Robert Boucher soulignait que des efforts sont faits pour attirer de nouveaux habitants sur la commune « dans le domaine immobilier, on peut se féliciter du travail effectué, le nombre d'habitants diminue, mais on se loge aujourd'hui plus confortablement. Les centres culturels et installations sportives existants sont nécessaires ».
Concernant la pérennité du bassin d'emploi, il est plus amer : « Les exigences du monde industriel demandent de plus en plus aux municipalités d'être, non seulement à l'écoute mais à la recherche, voire disponibles à merci et encore »...
  Philosophe, il ne résiste pas à l'envie de citer Pierre Jakez Hélias dans « Midi à ma porte » : « Une fois détruites les petites communautés - quel beau mot que celui de commune -  et les civilisations cantonales que l'on appelle des « pays », au profit de masses amorphes, il n'y a plus que des individus à vau l'eau, émigrés d'une part, immigrés de l'autre du même coup et dont les pulsations massives, aussi violentes qu'elles soient, manquent de ce ferment qu'on ne peut appeler autrement qu'une âme ».

Consultez aussi le dossier complet de l'INSEE d'où sont extraits certains graphiques

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