En 1660 Colbert lance la réformation du domaine royal en Bretagne, c'est-à-dire la vérification des aveux (1) et déclarations des sujets du roi, roturiers ou nobles, vis-à-vis de propriétés incluses dans le domaine du roi et pour lesquelles sont dus des droits et impôts divers.
Ces documents manuscrits seront regroupés dans des « Terriers » c’est-à-dire des registres. Ceux de Scaër, dépendant de la sénéchaussée de Concarneau ont été rédigés en 1678. Il faudra attendre la période 1818-1828 pour l'élaboration d'un cadastre .
La montaigne de Cleumerrien s'étend presque jusqu'à l'aérodrome Bretagne-Atlantique ( Google Earth) |
Voici quelques extraits de ces registres concernant le quartier de Cleumerrien (Page 212) rédigé en 1678, transcrit en respectant en partie l’orthographe de l’époque avec le concours de Christian Corlay (assistance paléographique Généanet) . Il y a peut-être des imprécisions et des doutes dans cette traduction de manuscrits de la langue française de l'époque de Louis XIV. Mais on comprend l'essentiel.
Terre chaude labourable, froide, lande, guaraine, pré, prairie....
La première page de la déclaration concernant Cleumerrien cliquez pour agrandir |
« Le lieu de Cleunmeurien en entier sittué ladite paroisse de Scaër, consistant en quatre tenues, possédées audit titre de convenant et de domaine congéable sous le dit sieur déclarant l une par Jan Le Gleonnec, et Henry Guichet, contenant sous hebergements, court aire pourpris et autres yssues et franchises un journal et demy sous terre chaude labourable terres froides garaine prés et prairies et autres despandances quarante et quatre journaux,
dessus laquelle tenue est deub par checun an de rente fontiere et convenantiere audit sieur
déclarant par chacun dit jour et terme de la Saint Michel en septembre la somme de quatre livres monnoie par argeant, trois minots d’avoine six chappons, corvées ordinaires, droit de champart et suiection (sujetion) au moulin dudict sieur declarant comme ses autres suictes et vassaux et pour ce cy ……..4 lt monnoie par argeant 3 minots d avoine 6 chappons corvées ordinaires
Autre tenue possédée par Allain Toulgouet, Guillaume Lavellou et ledit Henry Guichet contenant sous hebergements court, aire, pourpris yssues et franchises un journal sous terre chaude labourable, froide, lande, guaraine prés et prairie et autres despendances soixante journaux
dessus laquelle tenue est deub par checun an de rente fontiere et convenantiere audict sieur declarant à checun jour et terme de Saint Michel en septembre, la somme de quatre livres dix huit sols monnoie par argeant, quatre minots comble et foullée d avoine, deux chappons, corvées ordinaires droit de champart et sujection aux moulins dudit sieur déclarant, comme ses autres suicte et vassaux cy …..4 lt 18 s monnoie par argeant 4 minots comble et foullée d’avoine 2 chappons corvées ordinaires.»
La chappelle de nostre dame de Penquern
En plus des quatre tenues (3) affectées à Jean Le Gloanec Allain Toulgoet, Guillaume Lavellou et Henry Guichet, les tenanciers pouvaient disposer de terres en indivision, dans les « Montaignes » , en breton « minez, miné » . Nous les avons repéré sur une carte actuelle
La " montaigne" de Cleumerrien, c'est le " Mine Wern Zu" ou encore la " montaigne du Guern du" au XVIIe siècle, soit la "montagne du marais noir". A l'époque y passaient surtout des moutons. Les loups étaient également présents. Le site est en partie une tourbière |
« Outre ce que dessus possède lesdits tenantiers en commun et indivis entreux, sous ledit seigneurie (sieur ?) déclarant aux yssues dudict lieu de Cleumeurien deux montaignes landes et pièces de terre froides (?) nommés l’une Menez Cleumeurien à prendre du chemin qui mène de la chappelle de nostre dame de Penquern à la droite de la fontaine du Boudou Banal au bourg de Guiscriff d’un ruisseau qui dévalle de ladite fontaine faisant la séparation de ladite montaigne de Cleumerien de celle de Guiscriff, et des terres despandantes du lieu de Gounizec (Bonizac?), pour se rendre au moulin du Cleuziou et des autres endroits sur terres despandantes du lieu de Gonizec Querfranic (Bonizac, Kerfring?), de Nonnenou ( ?,)( peut-être Nonnenou= Nonaou?),
En pointillé le chemin direct qui conduit au bois de Gournois et ses variantes aux Cinq Chemins sont encore repérables sur les cartes actuelles |
et l’autre montaigne nommée Menez Mazeas ( Miné Maes) serant (?) d’un endroit sur le chemin qui conduit du bois de Gournois, et d’autres endroits sur terres despandants de la commanderie de Saint Jan Paraclet dans lesquelles, deux montaignes ledit sieur declarant à droit de lever et percevoir le droit de champart à la quatriesme gerbe, des bleds que lesdits tenantiers y gaigneront par esgobue et azzurs (?) de terre, arzur»
Lesquels lieux de Loquenguff et de Cleumeurien terres detenues en despandances ont esté acquis par ledit sieur declarant de messire Jacques le Trancher et dame Françoise Raoul sa compaigne sieur et dame du Botilliau (Bodono ?) par contrat du vingt et sixiesme may mil six centz septante et un sans aucune charge de cheffrant.
Le " sieur déclarant" est le propriétaire de l'époque François de Kermeno, sieur de Coëtforn .Il avait acheté Cleumerrien et Locunduff à Jacques Le Trancher et Françoise Raoul le 26 mai 1671.François et son dernier fils Charles Robert s'éteignent à un jour d'intervalle en 1724 au manoir de Coëtforn. Les titres et terres sont transmis aux Guernisac par le mariage en 1687 de Marie Thérèse Olive de Kermeno dernière du nom et de René de Guernisac (manoir du Stang en la Forêt-Fouesnant). Par la suite, Cleumerrien demeurera dans la famille de Guernisac durant les quatre générations suivantes via leur fils François né en 1688 puis Jean Pierre, Ange, Louis dont la veuve née Marie-Reine Barazer de Lannurien vendra l'ensemble des "tenues" à leurs exploitants en 1908
Acte de vente des terres de Cleumerrien par la comtesse de Guernizac le 28 octobre 1908. Sur cet acte apparaissent les héritiers successifs : Jean Pierre, Ange, Louis |
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A côté des seigneurs laïcs et ecclésiastiques figurent des roturiers propriétaires de tenues réduites et le plus souvent en indivision. A titre personnel, Jean Le Gloanec ( 1629-1898) , locataire d’un domaine congéable à Cleumerrien, possédait aussi quelques arpents de terre sur lesquels il devait payer un impôt ( cheffrant) de 5 deniers . Il a fait la déclaration suivante:
"Le village de nounnenou (Nonaou) ledit village appartenant à Jan Le Glouannec et autres avec une montaigne nommée mené menehas (Mine Maes?) proche ledit nouenou/nonenou, sur quoy est deub (du) de cheffrant cincq deniers monnoie par argeant "
Acte de naissance, en latin, de Joannis le Gloanec (Mairie Scaër) |
Les
descendants de Jean Le Gloanec, onze générations, ont possédé des
terres à Nonnenou-Nonaou jusqu'en 2014 ( Cliquez pour agrandir) |
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(1) Aveu, déclaration écrite fournie par le vassal à son suzerain lorsqu’il entre en possession d’un fief. L’aveu est accompagné d’un dénombrement décrivant en détail les biens composant le fief. La description fourni dans l'aveu indique le détail des terres ou tenues possédées par le vassal : le village dans lequel se situe la tenue, le nom du fermier exploitant le domaine congéable, le montant de la rente annuelle (cens, chefrente, francfief) due par le fermier composée généralement de mesures de grains, d'un certain nombre de bêtes (chapons, moutons) et d'une somme d'argent ainsi les autres devoirs attachées à la tenue : corvées, obligation de cuire au four seigneurial et de moudre son grain au moulin seigneurial, la superficie des terres froides et chaudes de la tenue. Source : histoiresdeserieb.free.fr.
(2)- Le bail à convenant ou à domaine congéable est un contrat par lequel le propriétaire d'un fonds en cède la jouissance pour un temps déterminé moyennant une redevance annuelle et aliène au preneur « les édifices et superficies » c'est-à-dire tout ce qui est élevé sur le sol par le travail de l'homme, en se réservant la faculté de congédier le preneur en lui payant la valeur de ces édifices et superficies.
(3)-Terre généralement moins fertile concédée à un tenancier non noble par un seigneur à titre de seule jouissance)