Le Tekniscaër


  Trois jours hors du temps 

  Un rassemblement de musique techno, baptisé « Tekniscaër », s’est déroulé le premier week-end de juillet 2004 à Crénorien sur des terrains plantés aujourd’hui de sapins de Noël.

Un Cyclone sur la campagne scaëroise ?



 

En prévision de l’affluence , l’accès au site fut réglementé : tout le trafic fut canalisé vers Coadry, Ty-Louet, Roudouallec pour rejoindre Crénorien via Ty Motter. Comme pour les avions qui tournent autour des aéroports, des itinéraires de délestage étaient prévus par Coray-Trégourez pour qu’il n’y ait pas trop de véhicules simultanément sur la route communale Roudouallec- Ty Motter, la seule permettant d’accéder à la fête. On évoquait même la possibilité de faire visiter le Sud-Finistère aux voitures sortant de la voie-express afin de ralentir le flux se dirigeant vers Roudouallec. Le départ des Teufeurs se faisait par Miné-Tréouzal, Languedoret, Rest Ar Chuz, une route communale de Guiscriff.

Il faut traire les vaches !


Pour la sécurité des parcelles riveraines du site,1.200 mètres de barrière métallique furent posées. Des entreprises scaëroises de débroussaillage nettoyèrent le champ avant la Teuf. Suite à une réunion avec les organisateurs, des commerçants scaérois fourniront du pain et des produits alimentaires à Crénorien.

De 17h à 18h vendredi et samedi, les teufeurs firent une trêve afin de permettre au quartier de retrouver une certaine tranquillité et aux agriculteurs de s’occuper de leurs animaux : il y avait 800 vaches dans le secteur qu’il fallait traire avec le maximum de sérénité. « On ne sait pas comment réagiront encore les poussins livrés cette semaine dans un élevage avicole du quartier ». Les Teufeurs profitèrent aussi de cette trêve pour nettoyer le champ et se reposer peut-être.

Risque d’acouphènes


Les riverains et ayants droits reçurent un badge pour circuler sur les routes réservées, contrôlées par les gendarmes mobiles. Une circulaire incitait ceux qui le peuvent à s’absenter en partie ou en totalité s’ils ne peuvent supporter les nuisances sonores. 6.000 bouchons d’oreilles furent distribués gratuitement à la mairie de Scaër afin de prévenir les risques de lésions du système auditif. Idem à Roudouallec et Guiscriff. Le poste de commandement opérationnel ( PCO) regroupant la gendarmerie, les pompiers, le Samu, la Croix-Rouge, la Protection civile, les Douanes fut installé à l’école Joliot-Curie, où 500 gendarmes étaient hébergés. Des salles de classe furent mises à disposition des services judiciaires et d’investigation. Un poste médical avancé avait été créé par le SDIS à la halle des sports.


5 km à pied...

 Le cyclone annoncé ne s’est pas abattu sur le quartier de Crénorien : les riverains avaient pris leurs précautions : toutes les entrées de champs de Parcou Bruk à Roudouallec avaient été bouchées par des levées de terre des pylônes électriques ou du matériel agricole lourd, les bovins les plus proches du site avaient été éloignées, les cultures riveraines protégées par une palissade haute de deux mètres.


Les pompiers avaient installé un poste incendie derrière la chapelle de Saint Paul dont on sait que le clocher penchait à cette époque. En plaisantant, ils rassuraient les teufeurs leur rendant visite : ils n’avaient pas d’illusion d’optique consécutive à la consommation de « butun droll » ! Un poste de secours avancé occupait la cour de la ferme de Crénorien.

Les pompiers en alerte près de la chapelle Saint paul
Des dizaines de jeunes descendirent le samedi du car SNCF en provenance de la gare de Rosporden : il n’a jamais eu autant de voyageurs ! Ensuite, c’est à pied, sac au dos que les courageux teufeurs parcoururent les cinq kilomètres entre le pied de l’église au Tekniscaër. Les amoureux de la Nature faisait une halte intermédiaire pour contempler la vallée de l’Isole au Pont-Daner.


« L’excès mène à la sagesse »!

Marcel et François-Louis, deux "papis teufeurs"

Bon nombre de Scaërois firent le même trajet à pied, pour ne pas à avoir à rouler 25 km, empruntant les chemins ruraux de traverse pour « voir à quoi cela ressemble une rave ». Ils y ont apprécié l’ambiance bon enfant, constaté que souvent un sac poubelle était accroché au rétroviseur des voitures des teufeurs, que le bruit à 20 mètres « n’était pas plus fort que celui des sonos de la cavalcade », souri en voyant les nombreux chiens de tout acabit tenter de creuser le sol. Les murs de sons étaient répartis sur l’ensemble du site, s’interpellant sur des tempos plus ou moins rapides. Bon nombre d’entre eux arboraient le drapeau Gwenn-ha-Du.

Avant de quitter le Tekniscaër, les promeneurs ont jeté un regard condescendant sur les teufeurs fatigués d’avoir trop dansé (en principe) dormant à même le sol. En rentrant, ils ont eu le temps de méditer cette maxime philosophique inscrite sur le hayon arrière d’une vénérable Renault 4 L : « L’excès mène à la sagesse »!
Les commerçants locaux, même s’ils ont eu à déplorer quelques larcins, ne sont pas mécontents de leur chiffre d’affaires : 30.000 Teufeurs, c’est autant de consommateurs !


Quelques décibels attardés étaient encore perçus le lundi matin du côté de Crénorien et Saint-Paul mais la quasi-totalité des teufeurs avaient quitté le site au cours de la soirée de dimanche et de la nuit, ce qui n’a pas été sans créer quelques embouteillages dans la rue principale de Scaër.

Livraison aérienne 


Mardi matin, les bénévoles ont terminé le nettoyage du champ, regroupant les déchets en tas. Il était prévu qu’ils continuent au cours de l’après-midi pour ramasser les derniers bouts de verre ou capsules de bière, mais les forces de l’ordre leur ont intimé l’ordre de partir. Un chercheur de trésor se promenait en passant son détecteur de métaux au ras du sol, dans l’espoir de récolter quelques euros, mais selon ses dires la pêche n’était pas bonne.

Une demi-douzaine de voitures stationnait encore sur le site. Les riverains regardant par la vitre dans l’une d’entre elles, ont cru voir un gourdin : il s’agissait en réalité d’un bambou de fort diamètre destiné à un autre usage ! Sur place on échange ses impressions sur l’état du champ. Certes la terre est tassé mais le sol est demeuré propre : « un coup de labour et on pourrait semer du blé noir »


D'autres mini  "Teufs" ont suivi . Ici à Coat-Loc'h.


Une anecdote qui révèle un stratagème utilisé par les dealers pour faire parvenir des produits illicites sur le Tekniscaer. Le mardi précédent, un ULM survola le secteur pour libérer un paquet suspect, qu’un motocycliste devait récupérer au sol. Les gendarmes veillaient : ils ont demandé au motard de s’arrêter. Il a tenté de fuir avant d’être intercepté manu militari. Lors de la rave, un autre ULM a tenté de survoler la fête, peut-être par simple curiosité. Les hélicoptères de la gendarmerie ont décollé illico et l’ont fait déguerpir.
Plusieurs mois plus tard, le propriétaire du champ retrouva aussi une seringue et un sachet lovés dans une marche de pylône électrique.



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