4 novembre 1963. Un cyclone à Coadry

 


 Les médias nationaux attirent notre attention de temps à autre sur un événement climatique majeur et localisé  entraînant d’importants dégâts. On se dit, pour se rassurer, que cela ne peut pas arriver à Scaër . Et bien si !  le Lundi 4 novembre 1963, un cyclone se déplaçant dans une direction sud-ouest vers nord-est dans un couloir large d’une trentaine de mètres et long d’une dizaine de kilomètres prit naissance près de la forêt de Coat-Loch pour toucher les villages de Kerguing, Le Guellec, Prat-Cotter, Coadry, Goarem Vian, Goarem Vras, Kervir.

Comme une escadrille d'avions

Selon la presse locale, "cet ouragan, cette tornade, ce cyclone" frappa après 5 heures du matin la région de Coadry , plus particulièrement le carrefour des routes de Coray et Ty-Louet. Témoignage de Monsieur Paillard : « Une pluie battante vers 5h30 du matin puis soudain un grand bruit telle une explosion une lueur blanche. La pluie a cessé aussitôt et le vent en quelques secondes dévasta tout sur son passage.  J’étais réveillé et aller me lever mon épouse aussi. Elle n'avait pas encore pris ses occupations dans la cuisine. Fort heureusement tous les carreaux avaient volé en éclat point ». Témoignage de Madame Vigouroux qui tenait un café tabac au carrefour : « J’étais réveillé, il était environ 5 h 15. La pluie tombait drue. Soudain passa dans le ciel deux fois consécutives une grande lueur blanchâtre virant sur le violet. La pluie cessa. Et dans un fracas épouvantable comme s'il passait une escadrille d'avions à réaction, la maison trembla dans ses assises ».

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Trois groupes de maisons de Coadry subirent les effets destructeurs de cette tornade, le principal sinistré étant Charles Coyet.


Un coup dur pour M. Coyet qui venait de s'installer à son compte



Ce qui restait du nouveau bâtiment d'élevage de poulets après le passage de l'ouragan

Dans la cour à proximité de sa maison Charles Coyet avait érigé  quelques mois auparavant un nouvel élevage de poulet dans un bâtiment tout neuf long de plus de 100 m large de 50. Ce bâtiment qui abritait 7000 poussins n'était plus qu'un amas de planches. La toiture avait été arrachée sur les trois quarts de sa longueur. Les installations intérieures gisaient à plusieurs dizaines de mètres à la ronde. Les débris de l'élevage de poulet étaient éparpillés un peu partout :on en a retrouvé au sommet des arbres. Les plaques de fibrociment de la couverture après leur promenade aérienne furent plaquées au sol avec une telle violence qu'elles étaient enfouies profondément dans la terre. Il fallut deux hommes pour les en arracher. La plupart des poussins avaient péri. Un coup dur pour ce jeune agriculteur qui venait de se mettre à son compte. Cet élevage hors-sol représentait un espoir d’avenir pour sa petite exploitation de 7 hectares seulement.

Le seau du puits atterrît dans un arbre

Tout près de ce bâtiment d'élevage se trouvait un grand hangar agricole abritant plusieurs tonnes de foin de paille, des aliments, du matériel agricole. Cette construction s'était littéralement volatilisée. Les planches et les poteaux pesant si lourds que seul un tracteur pouvait les traîner furent transportés sur des distances considérables. La porcherie s'était écroulée sur ses occupants. Trois porcs étaient coincés dans un recoin du bâtiment ne pouvant se libérer tandis que les autres avaient pris la clé des champs.  Il fallut les rechercher sous la pluie et la tempête.


Les poussins ne purent, en majorité , être sauvés



Le chien se demande ce qui arrivé à sa niche. A l'arrière plan, on bouche les trous dans la toiture

 Le petit local servant de laiterie avait été dévasté et la toiture de la maison bombardée par divers débris. Le seau du puits termina sa farandole autour de sa chaîne par un plongeon dans un arbre du voisinage; les bottes de paille  furent  éparpillées dans les champs aux environs. Un conifère fut retrouvé planté en terre dans une prairie à plus de 300 m après avoir volé au-dessus des maisons. Il avait été littéralement coupé en son milieu ce qui  suppos qu'il y avait eu de l’orage. 

Une chaîne de solidarité s'est aussitôt mise en place pour épauler les sinistrés à déblayer la cour, récupérer les poussins ,mettre à l'abri la paille le foin les pommes de terre la récolte. Les toitures furent recouvertes de bâches durant la matinée du jour suivant. Le préjudice fut estimé à 15 millions de francs de l’époque. (*)

De l'autre côté de la route, des dégâts ont également été constaté chez madame veuve Vigouroux. Les tôles de la couverture de son hangar avaient disparu. Chez M. Paillard, route de Ty-Louet, deux clapiers furent soulevés et atterrirent à l’envers sur le talus voisin. Les barrières de la cour de la ferme se retrouvèrent au milieu de la chaussée. Dans le quartier, les fils électriques et téléphoniques jonchaient le sol . 

La récolte est faite!

Autre exemple de cette force dévastatrice une tonne à eau pesant plus de 1500 Kgs avait été transportée à plusieurs dizaines de mètres. Dans les champs, les navets et betteraves étaient sortis de terre par milliers comme si une gigantesque main les avait déracinés. La récolte était faite. En certains endroits les pommiers et arbres fruitiers furent pratiquement tous couchés sur le sol. Des débris de laine de verre provenant du poulailler sinistré furent retrouvés dans les champs de Kervir à 2 km du lieu du cyclone.



La toiture de ce hangar à fourrage  s'est volatilisée


Des débris du bâtiment sinistré  plantés dans le sol

Des dégâts furent aussi constatés sur les bâtiments au Guellec , Prat Coter, Kervir. Chez Monsieur Yves Coyet au Guellec les ardoises avaient été poussées à l'intérieur de la maison tandis qu'un panier à linge se trouvant au premier étage fut vidé de son contenu qui prit la voie des airs pour se percher dans les arbres à plusieurs centaines de mètres de là !

(*) Compte tenu de l'érosion monétaire due à l'inflation, le pouvoir d'achat de 15 000 000,00 Anciens francs en 1963 est donc le même que celui de 250 912,65 Euros en 2024

 Sources: Ouest-France et le Télégramme du mardi 5 novembre 1963.

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