Lundi 14 janvier 1924 vers deux heures du matin, l'équipe de nuit cessa le travail à la papeterie Bolloré à Cascadec. Le gardien en rendit compte immédiatement au contremaître, René Rannou qui se leva pour venir voir ce qui se passait. Quand il se présenta devant les ouvriers, Henri Jégou, bobineur, exposa au nom de ses camarades la raison pour laquelle le travail avait cessé : ils réclamaient une augmentation de salaire.
Entrave à la liberté du travail
René Rannou lui répondit que ce n’était pas à lui qu’il fallait s’adresser pour cela. Sur ce,Henri Jégou le renversa sur une table. Ses camarades Jean Rouat, Louis Diamant et Henri Gaillard lui crièrent « Ne frappe pas ». Le lendemain , le chef d'entreprise ,René Bolloré, averti par M. Rannou de ce qui venait de se passer, arriva sur les lieux vers 11 h 30. Il rassembla le personnel (32 ouvriers selon l’Union agricole ???) puis il se rendit à Quimperlé et s'en alla porter plainte. Le Procureur de la République fit immédiatement mettre en état d'arrestation, sous l'inculpation d'entrave à la liberté du travail, Henri Jégou, qui fut conduit à Quimperlé, menottes aux mains, entre deux gendarmes. Quelques jours plus tard, le tribunal condamna Jégou à 15 jours de prison avec sursis pour violences et voies de fait mais ne retint pas l’entrave à la liberté du travail.
Extrait de "La dépêche de Brest" |
8 heures de travail, 8 heures de loisirs, 8 heures de sommeil
La loi instituant 8 heures de travail , sans diminution de salaire, avait été adoptée le 23 avril 1919 . « Elle revêt une portée générale, s'appliquant aux salariés hommes et femmes. Elle énonce le principe de la journée de 8 heures et de la semaine de 48 heures et consacre ainsi l'expression des « trois 8 » : 8 heures de travail, 8 heures de loisirs, 8 heures de sommeil pour l'ouvrier. L'ouvrier peut aménager son temps de travail de façon à bénéficier d'une journée et demie de repos : c'est ce qu'on appelle la « semaine anglaise ».
Les bâtiments de l'usine construits par la Société Nantaise des Travaux Publics sont contemporains de cette action revendicative |
Elle prévoyait des dérogations à la journée de 8 heures lorsque certaines circonstances propres à l'activité en question le justifiaient. C’est cet argument qu’employa M. Bolloré pour expliquer l’application tardive de la loi à Cascadec : « Avant même que les décrets rendant exécutoire la loi de 8 heures dans les Papeteries aient été promulgué, je me suis préoccupé de leur application dans mes usines».
L'Écho de Bretagne conclut :"Quant à savoir si M. Bolloré avait envisagé antérieurement, comme il dit, l'application (de cette loi), c'est une autre question, il ne l'a dit, d'ailleurs, à personne. Nous n'avons qu'à constater un fait : avant le 1er février les ouvriers papetiers de Cascadec travaillaient 12 heures par jour".
Sources : Archives départementales (L'Union agricole et l’Écho de Bretagne),Wikipédia
Complément d'information: Bolloré à Cascadec