La genèse de l'espace Youenn Gwernig


En 1993, la municipalité conduite par François Bleuzen lançait le projet de réalisation d’un « centre socio-culturel » dénommé aujourd’hui « espace Youenn Gwernig ». Un équipement dont l’intérêt est aujourd’hui reconnu, avec des réserves concernant ses jauges de capacité du public, par la quasi-unanimité des Scaërois. Ce qui ne fut pas le cas à l’origine.


 L’espace Youenn Gwernig est issu en partie de la réhabilitation du Cin -Isole. Cet immeuble, situé rue Pasteur, a été construit en 1951 par la paroisse de Scaër. Le premier film diffusé en 1953 fut « Jeanne d'Arc ». Outre le cinéma, deux ailes servaient aux activités du « Patronage Gournerien Skaër » et de la paroisse (catéchisme, réunions). Le Cin-Isole fonctionna jusqu’en 1966. Après quelques années de sommeil, le cinéphile Corentin Cariou reprit  la projection de films sous le nom de Cinéma-Caméra; la programmation plus ou moins régulière dura jusqu'au milieu des années 80. Les cinémas ruraux subissaient alors la concurrence de la télévision et de la présentation de films récents dans les grandes villes.


La commune de Scaër, sous les mandats de P. Salaün et L. Nicolas, s'était intéressée à ce cinéma, mais les conditions n'ont pas été réunies à l'époque pour une acquisition de ce « bien d’église » par une municipalité de gauche. L’élection en 1989 de la liste de centre-droit conduite par François Bleuzen changea la donne : la majorité du conseil municipal décida de l'acquisition du Cin-lsole, pour 650.000 francs (équivalent 156.000 euros) en octobre 91. Il fallait faire vite, semble-t-il, pour pouvoir bénéficier de subventions concernant le maintien de cinéma en zone rurale.


Le Cin-Isole, devenu Ciné Caméra , vers 1980

Le centre culturel ouvert en 1995, baptisé Espace Youenn Gwernig en 2007


 Samedi 4 janvier 1992, à l'issue de la signature des actes notariés, Pierre Fiche, représentant le conseil économique paroissial, (mais aussi mentor politique de F. Bleuzen) remit officiellement  à la commune, les clefs du « Cin-lsole. L'objectif était d'en faire un espace culturel avec salle de cinéma, salle de spectacle, salles de réunion, salle festive.  Pour certains élus de l’opposition de gauche, un conflit d’intérêt (*) était sous-jacent.

1992 : la commune devient propriétaire du  site


 le film n'était pas du goût des socialistes

 Après avoir affiné son projet, lors du conseil municipal du 15 février 1993, la municipalité proposa le choix du cabinet d'architectes Geru pour assister et conseiller le comité de pilotage (comprenant des élus de toutes tendances), travaillant sur le projet, d'aménagement du Cin-Isole en un « ensemble socioculturel ». 

Les élus socialistes se demandaient si la réhabilitation de cette salle est la meilleure solution. Ils souhaitaient que la municipalité fasse une étude comparative entre plusieurs possibilités pour le même projet. M. Kerneis, élu communiste, se déclara surpris par la méthode de travail en cours : il eût mieux valu, avant d'acquérir le cinéma, définir clairement les objectifs, étudier le projet avec précision, réaliser les études de faisabilité. « Pour culturel que soit le projet, nous n'avons pas abordé le problème de fond dans la commission culturelle. Il aurait fallu s'intéresser à la faisabilité d'un cinéma avant de l'acheter, on fonctionne à l'envers ».
 Propos de Jo Courtet, élu socialiste: « Le contrat d'étude qui vient de nous être exposé porte exclusivement sur l'implantation d'un tel ensemble sur le site de l'ancien ciné Isole, c'est apparemment un choix logique puisqu'il appartient, depuis peu, à la commune, mais est-ce vraiment le meilleur choix ? Voilà donc un local vacant et retenu comme lieu d'implantation du futur équipement socioculturel, la cause semble donc entendue, ce sera là et pas ailleurs. Êtes-vous sûr que ce soit le meilleur choix et que ce soit celui que feraient les futurs utilisateurs, est-ce aussi le meilleur choix économique ? »;

 Le maire répondit que ce projet coûterait moins cher que de créer un nouveau complexe sur le site de l’ancienne gare (730 millions contre 1,3 milliard). Les élus de gauche auraient préféré construire un nouvel équipement dans le style de ce qui a été fait à Kerlabour à Guiscriff. Jo  Courtet:. « Nous craignons que tout ceci, mis bout à bout, n'avoisine le milliard de centimes et qu'à ce prix nous n'aurons qu'un canard boiteux, laid, peu fonctionnel, gênant pour certains voisins, la maison de cure ne se trouverait qu'à 11 mètres ». 

vue aérienne du quartier en 1986.
L'accès au cinéma se faisait par l'actuelle rue Hervé.
En ordure de la rue Pasteur, il y avait la station-service Lidec

En 1996, dans le cercle, le centre culturel a remplacé le Cin-Isole.
A : l'église; B/l'Ehpad; C : La Longère(MJC)
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Avantages et inconvénients

 Il y eut aussi à cette époque une réunion publique au cours de laquelle la municipalité détailla les avantages de son projet : une salle festive prolongée d'un hall et des salles de réunion pouvant accueillir 600 personnes assises ; la création d'une bibliothèque agréable, un local de répétition pour la musique, un office traiteur...
Personne ne contesta la nécessité d'une salle des fêtes à Scaër mais le choix du site  fut très controversé pour diverses raisons :risques d'accidents pendant la traversée de la route; la proximité de la maison de retraite de la section de cure, les nuisances dues au bruit à la sortie des manifestations; l'impossibilité d'expansion de la maison de retraite, le manque de parking; l'impossibilité d'extension aux abords de la nouvelle salle pour des manifestations telles que foire exposition, installation de chapiteaux; le déplacement de l'animation en dehors du bourg et l'impossibilité de recevoir les 2.000 festivaliers de la cavalcade.

 Après deux ans de travaux, l’ancien Cin-Isole ouvrit en 1995 juste avant les élections municipales. Au départ, il était prévu de dénommer cet ensemble « Centre Isole », une dénomination qui depuis février 2007, est devenu l'espace Youenn-Gwernig, « leurenn » en breton, du nom du poète, chanteur, écrivain né à Scaër en 1925 et décédé en 2006.


(*) Un conflit d'intérêts peut se définir comme une situation où une ou plusieurs personnes ou institutions sont au centre d'une prise de décision où leur objectivité et leur neutralité peuvent être remises en cause. Il y en a eu d'autres depuis...

 Sources : Ouest-France et Télégramme, vues aériennes IGN

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