En 1793, Jacques Cambry (Voyage dans le Finistère) présentait ainsi l’agriculture scaëroise : « Le dixième de cette étendue est passablement cultivée. Le reste n’offre que des landes, qui cependant par leur vigueur démontrent que la terre est susceptible de culture... Dans la commune de Scaër, peuplée de cinq cent hommes, on n’en compte que trois qui labourent la terre : le reste agiote, commerce, est ouvrier, fait des sabots dans les forêts voisines ... Ce canton produit du seigle, des avoines ; le blé noir y réussit rarement ; on n’y sème point de froment. Si les eaux des vallons étaient mieux dirigées, les gelées n’attaqueraient pas les jeunes grains, et l’on aurait de meilleurs foins ». Au cours du XIXe siècle, la situation évoluera progressivement. En 1943, Jacques Bruchet ( MNATP) et M. Vogel firent le point sur cette évolution.
Après 1945, la mécanisation a bouleversé les pratiques agricoles. Mais il y avait encore des chevaux de labour vers 1980 |
Trois régions agricoles
Ils analysèrent d’abord les paysages agricoles
Trois régions naturelles occupent la commune de Scaër
1°) Au Nord et Nord-Est : C’est un plateau qui s’étend sur les communes de Scaër, Leuhan Roudouallec, Guiscriff. C’est une région au sous-sol schisteux recouverts de dépôts qu’alluvions que les géographes datent de l’éocène ; « Le terrain formé par ces dépôts est à l’état naturel lourd et infertile. : c’était une lande inculte, parcourue par les troupeaux de moutons ». Les propriétés étaient grandes, les talus rares et bas, les arbres absents à l’exception de quelques pins. Bruchet évoque même un « plateau marécageux » à propos des Miné.
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Depuis le début du XXe siècle des transformations importantes en ont modifié les caractères primitifs : morcellement de certaines propriétés, défrichements, édification de talus. Les créations de voies de communication a permis l’acheminement des engrais et des amendements calcaires (maerl, sable coquillier) jusqu’aux champs les plus éloignés. Vogel : « Malgré les progrès, ces terres restent moins fertiles que celles situées dans les schistes plus au sud ». Bruchet :"Sur le plan cadastral, je remarque que dans le nord de la commune, les champs tirés au cordeau semblent indiquer un défrichement plus récent comme à Cleumerrien".
2°) Au Centre :La région des schistes micacés et feldspathés du centre l’ancienne région riche de Scaër, sillonnée de nombreux ruisseaux le l’agriculture y est plus ancienne et le peuplement plus fort.
3°) Au Sud : Région granitique du Sud : relief plus accidenté et sillonné de nombreux ruisseaux. Zone de forêts, Cascadec, Coat-Loc’h.
Les clôtures, le peuplement
Bruchet a observé les clôtures des champs « Dans
la zone nord, les clôtures sont des talus de terre de 1 à 1, 50 mètres
de haut et autant d’épaisseur. Ils sont plantés de chênes, saules,
châtaigniers%, sapins. Dans le sud de la commune, il relève des talus de
terre à deux parements de pierre de 1, 5 à 2 m de haut et autant de
large. Ils sont plantés d’arbres de landes, de genêts. Dans la zone
voisine de Saint Thurien et Bannalec, abondent les murs de pierres
sèches de 1 m de haut, 60-70 cm d’épaisseur, couronnés ou non de mottes
de gazon ».
Vogel a observé l’occupation de l’espace rural « Les
hameaux est le mode de peuplement le plus ancien, regroupant 6-7
fermes. Ils sont plus isolés dans les régions de landes du nord. Dans
les régions marécageuses on trouve également des petites exploitations
de quelques hectares, des pennti de journaliers qui ont réussi à se
développer jusqu’à de 3-6 hectares vers 1870. Dans toute la commune,
des artisans et petits commerçants sont essaimés le long des routes
(épiceries, boulangerie, débit de boissons, forgerons). »
L'occupation des sols, les productions
J. Bruchet établit une comparaison de l’occupation des zones rurales pour Keranguen et Célériou en se basant sur le cadastre.
- Keranguen
Occupation des sols 1830 1913
Landes 43% 12%
Terres 42% 71%
Pâtures 2,8% 6%
Prés 4,9% 5%
Courtils, jardins 1,3% ---
Terres plantées 4,7% 3%
Sol 3% 1,8%
- Celeriou
Occupation des sols 1901 1943
Landes 37% Néant
Terres 54% 98%
Pâtures 3,4% 1,7%
Courtils 3,2% 1,18%
Sol 0,12% 0,12%
Vogel analysa les évolutions des productions entre 1895 et 1938
Les céréales traditionnelles ont régressé 850 ha de seigle en 1895, 295 en 1938 ; avoine sur la même période passe de 1050 ha à 545 ha, le sarrasin : de 1200 ha à 725 ha. Les superficies ensemencées en blé font un bond important de 65 à 1550 ha. L’orge était inconnue en 1895, 15 ha sont recensés en 1928 et 550 ha en 1938.Les cultures légumières se développèrent après la guerre 1914/1918: 10 ha de haricots verts cultivés en 1923, 95 en 1938. Les petits pois représentent une faible surface en 1921 mais 380 ha en 1938. Petits pois , haricots verts, flageolets alimenteront la conserverie de Pont-Lédan à partir de 1929.
Ses recherches concernaient aussi l’élevage :les ovins diminuent 550 moutons en 1895, 241 en 1938. Le nombre de chevaux demeurent stationnaires durant cette période, entre 1100-1200 bêtes. L’élevage bovin s’est développé :3820 têtes en 1895, 4890 en 1938. La progression est encore plus forte pour les porcs dont le nombre passe de 740 à 3685 dans cette période…Ces transformations ont été accompagné par des modifications dans la vie rurale, l’habitation, l’alimentation.
Parallèlement, J. Bruchet a fait une enquête sur les assolements pratiqués au début du XXe siècle. Les légumes sont la première culture d’un sol enrichi de fumier, 2e année : blé, 3e année : avoine ou seigle, 4e année : pâture de trèfle, colza, Suivent une ou deux années de jachère.
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Et aujourd'hui
Depuis 1970, des campagnes de recensement agricole ont pour objectif d'actualiser les données sur l'agriculture française. Il y avait 536 exploitations agricoles à Scaër lors du recensement de 1970, 444 en 1979, 287 en 1988 ,168 en 2000,115 en 2010 et 98 en 2020. A comparer aux données précédentes : 8883 bovins en 2020 dont 2921 vaches, 33650 porcs, 214246 volailles dont 213616 élevées pour leur chair. La Surface agricole utile était de 7035 hectares en 2020 dont plus de 70% consacrée aux cultures fourragères (30% toujours en herbe). Les céréales,oléagineux les oléoprotéagineux : 25 % environ . La part des cultures légumières : moins de 5%.
Sources:" Étude sur la géographique économique et humaine de Scaër" de M.Vogel, Notes manuscrites de Bruchet, Recensements agricoles récents. Film Garnier: cinémathèque de Bretagne