L'énigmatique entrepôt de Drolou

Que s'est-il réellement passé les 10 et 11 juin 1944 à Drolou? Ce quartier  était une zone de passage entre la forêt de Coat-Loc'h et Stang-Blanc où la présence de maquisards est avéré. Situé en bordure de la voie ferrée, le secteur était propice pour monter ou descendre du train en marche avec la complicité  du conducteur de la locomotive.
Le quartier de Drolou a été le cadre de combats entre des maquisards et les soldats allemands les 10-11 juin 1944. La voie ferrée Rosporden-Scaër, devenue voie verte, longeait le village  jusqu’au carrefour de Kerbasquiou


Un  entrepôt commercial ?


Un passage du livre « Le Finistère dans la Guerre » (1981) de Georges-Michel Thomas et Alain Le Grand relate les faits suivants « Dans la nuit du 10 au  11  juin,  c’est  l’exécution  d’une  opération montée contre un entrepôt commercial, pour assurer le ravitaillement du maquis. Deux tombereaux sont chargés. Le premier a rejoint sans incident Drolou, l’endroit convenu. Mais, à son retour à Scaër, une patrouille allemande attaque ses conducteurs. Pierre Le Fort, originaire de Lanester (Morbihan),  pris,  sera  fusillé  à  Quimperlé.  Son camarade Jean Le Doeuff réussit à s’échapper.
Pour le second tombereau, embuscade à Drolou.  L’escorte se défend, mais elle est insuffisamment armée.  Paul Pourhiet est tué. François Daëron, dit « Louis d’Or » (28 ans), Résistant de la première heure, à  court  de  munitions,  blessé  de  surcroît,  capturé, sera fusillé à Quimperlé. Jean Le Coz aussi tombe entre les mains des Allemands.  On retrouvera son  corps  dans  le  charnier  de  la citadelle de Port-Louis.
François Le Goc et Pierre Le Guillou– ce dernier bien que blessé – parviennent à s’enfuir. Les Allemands arrêtent la cultivatrice Mme Le Goc, qu’ils libéreront quelques jours plus tard.».

Un entrepôt de ravitaillement ?

En 2019 dans "Le Maîtron" Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson ont publié cette biographie de François Le Daëron, alias « Louis d’Or » : « Dans la nuit du 10 au 11 juin 1944, François Le Daëron dirigea une expédition d’une vingtaine de maquisards, parmi lesquels se de rendirent à Drolou en Scaër pour dévaliser un entrepôt de ravitaillement destiné à l’occupant et subvenir ainsi aux besoins du maquis. À Drolou, les maquisards tombèrent dans une embuscade et l’opération tourna au désastre. François Le Daëron fut blessé. Des résistants scaërois arrêtés le 11 juin au cours d’une autre opération le virent dans le camion qui les emmenait à Quimperlé, souffrant horriblement de ses blessures et des coups qu’il continuait de recevoir. Il fut incarcéré à Quimperlé (Finistère) dans la prison dite du Bel Air installée dans l’ancien couvent des Ursulines devenu aujourd’hui le collège Jules Ferry. ».

Témoignage du dernier survivant de cette époque

Ces deux textes, dont les sources sont référencées,  font allusion à un énigmatique « entrepôt commercial » ou « entrepôt de ravitaillement » dont la présence parait improbable pour Aristide Toupin qui demeurait à la ferme de Drolou. Nous lui avons posé la question suivante:
 - « Les Allemands avaient-ils un dépôt de nourriture à Drolou?
 -Mais non ! Où veux-tu qu’il y ait un dépôt de nourriture? Ils habitaient au château
».
 
La maison Le Goc (cercle rouge)est située à Drolou Vian au carrefour de la roue de Miné Groas Né et de la ferme de Drolou (point rouge), à proximité de la voie verte( ex-voie ferrée). Aristide Toupin n'a jamais vu d’entrepôt de nourriture dans le voisinage. Il y avait aussi des Résistants hébergés clandestinement dans les bâtiments de la ferme de Kerbasquiou. Cliquez sur la photo pour plus de détails
 


 Il avait 15 ans à l’époque. 78 ans après ces événements,il a conservé mémoire de ces événements dramatiques.  Il nous livre ce témoignage : « Je suis le dernier survivant de cette époque. J’ignorais où se trouvait le maquis de Drolou exactement. Car c’était dangereux à l’époque. Ce jour-là, j’allais faucher du trèfle pour les animaux qu’on avait à l’étable  et aux chevaux dans un champ voisin de cette maison. Je regarde : j’ai vu qu’il y avait un Allemand sur le talus en train de faire le guet non loin  de la maison Le Goc , la première maison à droite de l’entrée de la route vers la ferme. Probablement il y avait quelques maquisards dans la maison, la seule maison dans le quartier qui pouvait les accueillir en bordure de route. L’autre côté il y avait une lande, c’est là que les maquisards passaient leur temps. Ils n’étaient pas nombreux et se relayaient. Mme Le Goc, Anne Floc’h, leur faisait à manger. Son mari Soaïk Goc travaillait chez Bolloré. Certains résistants passaient leur nuit dans le grenier. Malencontreusement, les Allemands l’ont su. D’où la catastrophe. On peut imaginer qu’il y avait quelqu’un qui était au courant de la présence de ces résistants et aurait dénoncé leur présence
Les Allemands était à la recherche de "terroristes" selon leur expression.  Les personnes citées dans le livre devaient être là . À 2 heures de l’après-midi, les Allemands ils ont mis le feu dans la maison. Ils ont arrêté Anne Floch et elle est allée à pied à Quimperlé avec sa vache. Elle est rentrée quelques jours plus tard sans sa vache…Elle avait été innocentée ou pas ? Personne ne sait et personne ne le saura. C’était une brave personne. Elle ne savait pas qu’elle était en danger. Elle aurait si bien avoir pitié d’un Allemand.»