En creusant une tranchée afin de raccorder sa propriété au réseau d'assainissement, un habitant de Toyal a eu la surprise de déterrer en mai 2011 une pierre tombale en granit. Les noms de Louis Jigou et celui d'Anna Dahéron, "décédée le 29 janvier 1881 à l'âge de 65 ans" étaient gravés dans la pierre.
On peut se demander comment cette pierre, qui n’était pas encore en granit chinois, a été recyclée en remblai de cour. Si elle avait été gravée avant 1874, on aurait pu penser qu'elle provenait de l'ancien cimetière entourant l'ancienne église. Cette pierre tombale a sans doute été abandonnée par la famille pour être remplacée par un nouveau monument puis a servi à stabiliser cette cour de garage où stationnaient autrefois des poids lourds !
Des recherches dans les archives départementales de l’état-civil permettent d’en savoir plus sur ces deux Scaërois. Anne Le Daeron est née le 26 novembre 1817 à Pennaneac’h. Louis Jégou est né le 29 mai 1819 à Brénélio Ils se sont mariés le 22 novembre 1840 à la mairie de Scaër. Anne Le Daëron est décédée le 29 janvier 1881 et Louis Jégou le 18 décembre 1896.
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De la naissance à la mort, le nom de la défunte a été orthographiée de 4 façons différentes
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Quatre noms différents
On notera que sur la pierre tombale, LOUIS JÉGOU retrouve le patronyme JIGOU de son acte de naissance. Son épouse avait le patronyme LE DAERON sur son acte de naissance, puis Anne LE DAËRON sur l’acte de mariage ANNE DAËRON sur le registre des décès et ANNA DAHERON sur sa pierre tombale. De sa naissance à sa mort, le nom de cette personne a été orthographié de quatre façons différentes et celui de son époux de deux façons différentes. Autre constatation : Cette pierre tombale fut gravée lors du décès de Mme Jéjou en 1881.Cette gravure occupe une grande place sur la dalle. M. Jégou est décédé en 1896 : le marbrier a dû se contenter d’un espace plus restreint pour cette seconde gravure.
| Acte de naissance d'Anne
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| | Acte de naissance de Louis
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| Leur mariage
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| Acte de décès d'Anne
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| | Acte de décès de Louis
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Une explication plausible
Ce n’est pas une exception et elle peut s’expliquer par le fait par la prononciation de la langue bretonne pouvant varier d'une commune à l'autre et parfois d'une personne à l'autre. La langue française était peu répandue si bien que ,répondant à la question « Pesa añv peus ? » (Quel est ton nom ?), émis par l’employé de l’état-civil ( ou le marbrier) un patronyme pouvait été écrit différemment suivant la prononciation, l’intonation de la personne venant déclarer une naissance, un décès. Sans compter sur les erreurs de transcriptions d’un acte d’état-civil à l’autre de la naissance à la mort. Rien n’était fixé au XIXe siècle où la langue bretonne avait une tradition plus orale qu’écrite, avec une orthographe non codifiée.
Il arrivait ainsi que deux enfants n’aient pas le même nom en fonction de ce qu’avait entendu le rédacteur de l’acte d’état civil. A Guiscriff, il y a eu des frères qui portaient le nom de Hollocou et Hollécou. Idem pour les Morvant et Morvan, Montfort et Monfort….
Pour certains patronymes, une étude onomastique multiplie les variantes. Par exemple: Salaün, Salaun, Salun, Salahun, Saleun, Salin, Salain, Saladin. En français c’est Salomon, dérivé de l’ancien hébreu shlomoh (paix, pacifique) devenu aujourd’hui Shalom et Salam en arabe. L’évolution généralement donnée : Salamun, Salavun, Salahun en breton ancien, puis en breton moderne Salaün.
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