Située à Parcou-C’hoat, à l’arrière de la halle des sports, cette entreprise agro-industrielle a accueilli jusqu’au 130.000 pondeuses dans la dernière décennie du XXe siècle. Au plus fort de son activité, elle expédiait même des œufs en conteneurs réfrigérés à Hong-Kong! Des stagiaires de l’Europe de l’Est, d’Amérique du Sud ont séjourné dans cette entreprise ultra-performante dans les années 80.
De 6000 à 90000 pondeuses
Issue d’une affaire familiale, l’entreprise a commencé à prendre son essor en 1966, entre Kérisole et le stade de Kerjégu : « Nous avons rentré.6.000 pondeuses le 2 janvier 1966 », précisait Charles Laz, le propriétaire avec Robert Patin de « l'Élevage avicole de Cornouaille ». Depuis l'extension s'est faite progressivement et les 3 poulaillers longs de près de 90 mètres ont logé jusqu’à 90.000 poules en 1977.
Dans cet élevage XXL il y avait à l'époque 10 km de vis pour l'alimentation, 22500 points d'eau, style goutte à goutte. Consommation journalière d’eau : 20 m3 en partie en provenance du réseau communal et en partie d'un forage de 73 mètres de profondeur dans la nappe phréatique, forage effectué en 1976.
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Une réserve d'aliments de 125 tonnes, en six silos jouxtait les poulaillers. Il fallait à ces volailles en 1977 de 11 à 12 tonnes de nourriture par jour. On imagine la navette des semj-remorques de 20 tonnes, quatre fois, par semaine vers cet élevage.
Continuons cette énumération : 20 km de tapis pour la collecte automatique des œufs, 28 ascenseurs déposaient ces œufs sur quatre convoyeurs se dirigeant vers le bâtiment de la calibreuse. À l'autre extrémité du poulailler, les remorques des exploitants agricoles de la région recueillaient chaque jour 18 tonnes de fiente sèche acheminées hors des poulaillers par 8.000 m² de tapis caoutchouté. 88 ventilateurs brassaient un million de mètres cubes d’air par heure.
Cette importante entreprise était alimentée en moyenne tension par EDF et possédait son propre transformateur. En cas de défaillance du réseau, un groupe électrogène de 240 KWA, capable d'alimenter toute la commune de Scaër, se mettait à fonctionner en 4 secondes. N'oublions pas de signaler les 600 ampoules des poulaillers des 3 poulaillers de 1977!
Poules en cages
Les poulettes arrivaient âgées de 20 semaines et après une période d'adaptation de 3 à 4 semaines se mettaient à pondre durant une année avant d'être réformées. A cette époque, les pondeuses étaient quatre par cage, avec un éclairage réglé dans le temps et en intensité. "A la campagne, elles pondent moins l'hiver car, comme, la lumière détermine la ponte, il fait nuit de bonne heure. En élevage, la lumière est régulière et contrôlée. Ici une poule pond en moyenne 265 œufs par an" .
Elles étaient de race Warren-Studler et sélectionnées pour leur rusticité, leur forte production et le fait qu'elles pondent des œufs teintés." Les œufs blancs, les gens en veulent moins... Quand elles arrivaient, il y a du travail car il faut les vacciner une par une, on en faisait 20000 par jour à deux personnes, puis il fallait leur couper le bec. En principe, les maladies infectieuses (peste, bronchite) sont moins à craindre mais les épidémies peuvent entraîner une baisse de la production ".
20 000 œufs calibrés en une heure
La production journalière de l'élevage avoisinait les 75.000 œufs en 1977. Ces œufs arrivaient par convoyeur dans la salle de calibrage. Bâtiment climatisé propre à souhait, le bruit monotone du convoyeur, de la musique en sourdine et au milieu, la calibreuse. Un monstre pensant grâce à l'électronique capable de calibrer en 8 catégories 20.000 œufs en une heure.
Derrière, les cartons, plus de 200 par jour et les alvéoles destinées à recevoir les œufs : « Nous pratiquons la vente directe et sommes indépendants des fabricants d'aliments et des coopératives. Nous ne sommes que 6 à travailler au calibrage, dont 4 employés. Ce travail nous occupe 4-5 heures environ selon les jours. Autrement, ii y a les travaux d'entretien. Nous employons peu de personnel mais nous fournissons du travail aux usines d'aliments, aux transporteurs, aux cartonniers ».
Charles Laz (à gauche) et Robert Patin (à droite) recevant des visiteurs asiatiques en novembre 1986 |
La traçabilité
Dans le poulailler, un tapis roulant acheminait lentement les œufs vers un système automatique de transfert vers la salle de conditionnement. Une employée commençait par enlever les œufs cassés ou sales. Plus loin, ils étaient mirés afin de déceler les microfissures. Ensuite une machine prenait les œufs un par un et les déposait dans un conditionnement précis en fonction de leur poids : « Il y a cinq calibres, moins de 53 g, 53-63g, 63-73g, plus de 73 g, plus de 78g. Les gros œufs occupent des plateaux de 20. Les œufs non commercialisés via le circuit normal, car trop petits ou fêlés,sont vendus aux biscuitiers. Nous avons aussi une chambre froide où sont congelés des œufs à la coquille cassée. Bien sûr, la coquille est enlevée et l'œuf pasteurisé avant congélation. Ils seront employés ultérieurement en pâtisserie. Mais le pourcentage des pièces fêlées est faible, environ 3 % ». Les œufs destinés à la vente directe étaient marqués : date de ponte, date recommandée de consommation et le sigle EAC pour la traçabilité du produit. Des employées disposaient les boîtes à œufs ou les plateaux sur des palettes qui prenaient le jour même la direction de la région parisienne pour être proposés à la vente dès le lendemain.
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En 1999, l’élevage avicole de Cornouaille s'était agrandi et les premiers exploitants avaient vendu leur entreprise à Jean-Pierre Morel. 130.000 poules pondeuses passaient une année dans les quatre grands bâtiments longs d'une centaine de mètres. Quelques statistiques quotidiennes de l’époque : 15 tonnes d'aliments et 30 mètres cubes d'eau. 100.000 œufs étaient conditionnés chaque jour, sauf le dimanche, en plateau de 30 ou en boîtes de 12 par les six employés.
Fermeture en 2006
A l’aube du XXIe siècle, l’entreprise connut quelques problèmes d’ordre sanitaire : il a fallu vider les poulaillers et nettoyer l’ensemble des installations suite à un problème de salmonellose. Les machines n’ont pas supporté ce nettoyage agressif et les ennuis techniques se sont enchaînés à la reprise. L’élevage avicole a cessé son activité fin 2006 et le matériel a été mis en vente en vente. D’autres facteurs ont aussi joué : la grippe aviaire qui a bloqué le marché des poules de réforme, la mondialisation qui a entraîné la concurrence des pays émergents sur le marché de l’œuf : « Notre prix de revient est de 30 centimes l’œuf environ et il nous est payé deux fois moins cher » . L’extension de l’agglomération avec le voisinage d’un complexe sportif et touristique, du cimetière et d’un lotissement communal à 100 mètres rendaient problématiques la reprise de l’exploitation sur le même site. D’autant plus que les bâtiments et installations nécessiteraient une remise aux normes.
Par étapes, les poulaillers ont été déconstruits en 2011.Certains éléments de charpente en bois ou en métal ont retrouvé un usage, et des plaques de toiture ou de bardage en bon état ont été réutilisées. Un dernier poulailler est encore intact et sert encore d'atelier pour des carnavaliers .
Cette friche agro-industrielle st dans l'attente d'une nouvelle vie...