Peu avant l’an 2000, l’association pour la mise en valeur du patrimoine scaërois consulta les archives départementales et y releva plusieurs textes relatifs à trois hauts lieux de l'histoire médiévale locale: Coat-Forn, Kervégant et Trévalot. En voici quelques extraits classés par thème.
HISTOIRE D'UN AMOUR ET D'UN CŒUR BRETON
En 1685,René Le Sénéchal de Lezerarien en Guiclan, s'étant rendu au Château de Coetforn en Scaër pour demander la main de Demoiselle de Kermeno, tomba malade en route et mourut à Coëtforn. À sa sœur et héritière qui réclamait les effets laissés par le défunt, M. de Kermeno présenta une note de 3.000 livres pour frais de séjour et honoraires médicaux. Le chirurgien de Rosporden avait pris pour gage le cœur de son client, l'avait embaumé et le rendit qu'après arrangement. (Bulletins de la société archéologique du Finistère- Dr Lagriffe 1937).
TROIS RIVIERES, TROIS MOULINS
Du château de Coat Forn, il ne subsiste plus rien aujourd'hui. Au village est aussi édifiée une maison ancienne, bien restaurée, connue sous la maison du garde. Deux particularités : un four à pain exploité par l'intérieur de la maison, et une pierre portant la couronne comtale et le blason des Kermeno : trois rivières et trois moulins. Les talus alentour ont pu être montés avec des pierres provenant vraisemblablement du manoir. Ce dernier, d'après ce qui remonte du sous-sol lors des labours, devait se trouver entre la ferme et la maison dite du garde. Une allée bordée de chênes joint Coat Forn à la route Scaër-Rosporden, voie principale avant la Révolution, au lieu-dit « Beg an Allée ».
Les archives font aussi état de Guillaume de Coat Forn, présent au dit manoir, en 1426, ou d'un écuyer Alain Coat Forn, qui prête serment à la Dame de Rais en 1379, ou encore de Charles Robert Joachim de Kermeno, seigneur de Kerlo, conseiller au Parlement de Bretagne en 1670. Par héritage, c'est la famille de Legge qui a hérité de la propriété de Coat Forn et de quelques fermes environnantes.
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LE SORCIER
Vers 1330 Hervé de Trevalloet époux de Catherine du Pont de la famille des Seigneurs de Pont L’Abbé fut accusé d'avoir envoûté l'un de ses voisins Pierre Châtelain de Guergorlè ou Kergorlay. Il fut dénoncé par l'oncle de P. de Kergorlay à l'évêque de Quimper Alain Gontier et aux religieux qui dirigeaient l'inquisition dans la province de Tours. L'accusé fut traité avec extrême rigueur ses biens furent confisqués ainsi que ceux de son frère Henri de Trevallot. Le 22 Juin 1337 le pape invita l'évêque à traiter le prétendu sorcier avec plus d'indulgence.
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CHATELLENIE PUIS MARQUISAT
-Hervé de "Trévaloët" était capitaine du château de Pont- L'Abbé en 1383. Un manoir fut édifié par cette famille à 200 mètres à l'est de la motte de Trévalot de l'autre côté du vallon.
-1537 : le manoir et lieu noble de Trévaloet ( Trévalot) possédés par Louise de Launay après le décès de Catherine de Thomelin (1537).
-En 1553, Trevalot appartient à Messire Georges du Bueil, Chevalier, Gentilhomme de la Chambre du Roi, Lieutenant des Villes et Château de Saint Malo, à Dame Louise de Launay, Seigneur et Dame de Bouille, Vouvray, Guergelin, Pontsal, Plessis et Trévalloët.
-En 1630 ce manoir appartenait à Jean de Carné, baron de Carné et de Blaison, Vicomte de Colignac et de Thimillieres, Seigneur de Coëtcanton, Trevalot, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, Gouverneur de Quimper par provision du 18 Janvier 1632, fils de Jean de Carne et de Françoise de Goulaine. Il mourut en 1634.
Blason sur un pilier de la chapelle de Coadry |
- 23 Juin 1655. Ces terres (Kervegant et Trevalot) qui avaient chacune
une juridiction, furent unies par lettre du Louis XIV et érigées en
titre de Châtellenie (autrefois Seigneurie, juridiction d'un châtelain)
en faveur de Vincent Le Borgne De Lesquiffiou par lettres patentes de
Juin 1665 ( 1765 ? 1655 ?). En 1771, cette châtellenie fut vendue pour
115.000 livres par Charles de Montmorency-Luxembourg à Jean Joseph
Euzénou de Kersalaün qui obtint en 1775 qu'elle fut érigée en Marquisat
sous le nom d'Euzénou. Il y avait une geôle et une halle à Pont Aven. La
juridiction s'étendait sur Scaër et Tourc'h et s'exerçait à Scaer.Les
lettres royales autorisaient rétablissement d'un marché par semaine et
d'une foire par an.
Par lettre de Octobre 1775 (ou 1715 ?) Jean
François Euzénou, Chevalier, Seigneur de Kersalaün, obtint l'érection en
Marquisat des terres de Trevalot et de Kervegant. Kervegant étant venu
par mariage de la famille du même nom aux Du Juch puis aux Ploeuc en
1444
PREEMINENCES
Le droit de prééminence ou Prééminences d'église est un droit seigneurial surtout honorifique, qui permettait à ceux qui en jouissaient, généralement les seigneurs, d'avoir des places réservées dans une église, une chapelle ou une abbaye, au premier rang de la nef, et même souvent dans le chœur . Il y avait aussi des droits de banc ou d'escabeau avec accoudoir, droits à une tombe dans le chœur ou un enfeu seigneurial , droits aux armoiries dans les vitraux ou sculptées sur la façade…( Wikipédia). Ces droits apparaissent dans les extraits suivants
-1537 :Louise de Launay a déclaré avoir le chœur et le chanceau (1) en l’église paroissiale de Scaër ainsi que la chapelle de Coëtdry ( Coadry) où elle a ses armes en bosse, au lieu le plus éminent .
-Le 5 Mai 1544 -" Pièce de procédure entre les paroissiens de Scaër et nobles Gens Georges du Bueil, chevalier et Dame Loyse de Launay, Seigneur et âme de Trevalouët, au sujet des prééminences revendiquées par ceux-ci et qui avaient été usurpées auparavant par Ollivier de Ploeuc, Seigneur de Kervegant et homme austère, craint et redouté en ladite paroisse et es environs, en manière que personne ne lui osoit contredire, que par luy et autres que par luy, avoit ménagé les paroissiens de grands maux tant de leurs personnes que les charges de gens de guerre, s'ils eussent différé à consentir ce qu'il demandoit".
- 18 Février 1622: Procès-Verbal fait par Tanguy de Botmeur, Seigneur dudit lieu, Sénéchal de la Cour de Conq, Fouesnant et Rosporden, en l'Église de Scaer pour servir de Procès entre le Seigneur de Kervegant et les de Carné (2). Une rivalité entre les deux familles concernait la prééminence en l’église de Scaër, " Il aurait eu la maîtresse vitre au 3° soufflet (élément en forme de lance ou de pique des fenestrages du style gothique flamboyant) du second rang du côté de l'épître un écusson entouré du collier de l’ordre de Chevalier du Roy, portant l'argent parsemé d'hermines à deux chevrons rompus de gueule que la Dame de Kervalin (?) dit être celle de Ploeuc, Seigneur de Kervégant à cause de la dite terre, ainsi que ceux qui sont dans le 1ère vitre de la chapelle de Notre Dame du côté de l'Évangile du grand autel où il y a trois écussons, l'un en haut de Ploeuc, en alliance avec Trévalot, qui sont d'argent à trois bandes de gueules et les 2 autres de la maison de Kervégant à 3 chevrons d'or avec les armes de Ploeuc.
En cette chapelle il y a sur un banc à accoudoir, les pleines armes de Ploeuc et un long banc sous l'arcade de la dite chapelle au-devant de l'endroit où repose le précieux corps de Notre Seigneur, il y a une tombe enlevée aux pleines armes de Ploeuc et de Trevalot".
Une des prééminence de Coadry (monographie Chanoine Pérennés.1926) |
MOTTE de TREVALOT
Cet ouvrage est établi sur un interfluve qui domine d'une quinzaine de mètres la confluence de deux ruisseaux. La motte s'élève en position de barrage au sud-ouest tandis que la basse-cour lui est contiguë au nord-est, sur le coteau boisé en pente douce. Le tertre dessine un rectangle aux angles très arrondis, orienté nord-sud perpendiculairement à la pente du terrain. Il est de type cratériforme : un talus large de 2 à 4,5 mètres et haut de 1,5 mètre cerne une aire de 20 mètres sur 10 mètres qui s'ouvre au sud-est. La hauteur de la motte est d'environ 4 mètres à l'ouest et de 7 mètres au nord-est, notamment du fait de la pente du terrain. Le fossé mesure 4 mètres de largeur et 2 à 3 mètres de profondeur.
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La basse-cour dessine un rectangle aux angles arrondis d'une trentaine de mètres de côté. Son talus, large par endroit de 2 à 3 mètres, est haut de 3 à 4 mètres par rapport au fond du fossé. On distinguait autrefois les traces d'un bâtiment à l'intérieur de celle-ci ( la chapelle Saint Eutrope selon un habiant du quartier).
L'ouvrage appartenait aux seigneurs de Trévalot qui détenaient le fief le plus important de la paroisse, cité comme ancien vicomté. Ils exerçaient les droits de haute justice et étaient premiers prééminenciers (Supériorité absolue de rang) dans la chapelle voisine de Coadry qui conserve une nef du Xle siècle. (Source :Les fortifications médiévales du Finistère. Kernévez-1993)
LA LEGENDE DE COADRY
Consultez la page Coadry : un ancien site religieux celtique pour découvrir cette légende.
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(1) Grille, balustrade à jour, ordinairement en métal, en pierre ou en bois qui est placée dans une église autour du chœur ou du sanctuaire.
(2) En 1630 Le manoir de Trévalot appartenait à Jean de Carné, baron de Carné et de Blaison, Vicomte de Colignac et de Thimillieres, Seigneur de Coëtcanton, Trevalot, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, Gouverneur de Quimper par provision du 18 Janvier 1632, fils de Jean de Carne et de Françoise de Goulaine. Il mourut en 1634.