Le 13 juillet 1789, une force armée de 48 000 hommes est créée pour assurer le maintien de l'ordre dans la capitale. Son commandement est confié le 15 juillet à La Fayette. Elle reçoit le nom de garde nationale. Dans la plupart des villes et dans de nombreux villages, des milices sont formées sur ce modèle. Leur recrutement varie selon les régions mais est surtout réservé à l'origine aux citoyens aisés. Le décret du 14 octobre 1791 décide que le service dans la garde sera obligatoire pour les citoyens actifs de dix-huit à soixante ans.Scaër devait fournir 27 volontaires pour le service des batteries côtières de Quélern (*).
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En septembre 1792, les administrateurs de la commune de Scaër se font tirer l’oreille parce qu’ils n’avaient pas créé cette garde nationale. Voici le courrier émanant de la sous-préfecture (sources : Archives départementales-documents administratifs et judiciaires période révolutionnaire-1790-an VIII).
"Quimperlé, le 26 7bre.1792 ( 7bre= septembre)
Messieurs,
Nous venons d'apprendre avec le plus grand étonnement que vous n'avez pas encore organisé votre Garde Nationale, vous êtes presque les seuls qui n'avez pas encore satisfaits à ce devoir.
Nous avons vu avec la plus grande satisfaction que tout s'est passé dans les autres paroisses avec la plus grande tranquillité. Vous n'avez pas encore complété le nombre des hommes exigés pour les batteries de Quelerne .
Vous avez encore des prêtres non assermentés vous les tolérez dire la messe dans les chapelles et vous entretenez par le fanatisme. Si vous ne remplissez pas vos devoirs sur tous ces différents objets au plus tard dans la semaine prochaine nous seront forcés d'user de la plus grande rigueur et d’employer la force armée à vos propres frais. Nous nommons pour Commissaire pour l'organisation de votre Garde Nationale, Mr Bernard. Nommez ou contraignez les sections défaillantes à nommer pour les batteries de Querlerne".
Le municipalité scaëroise répondit quelques jours plus tard:
"Dimanche dernier ( 30 septembre 1792) les jeunes gens des sections qui n'avaient pas fourni leur contingent pour Quelerne ont été avertis de l'Assemblée aujourd'hui en ce bourg de Scaër, les jeunes gens de la Section de Caradec( Cascadec ?) qui avait déjà fourni un homme se sont rassemblés et ont indiqués comme défaillants, Jacques Richard et Guillaume Richard, sabotiers de la Garenne de Kervéguen en cette paroisse qui étant de cette trêve ont contribué à la levée de la Grande trêve dans laquelle ils n'ont jamais demeuré. Ils ont aussi déclaré comme défaillant Louis Daniellou, propriétaire de cette paroisse y demeurant depuis quinze jours au village de Kersao en qualité de domestique en laquelle il a servi successivement tantôt à Kernevel, tantôt à Bannalec, depuis cinq à six ans.
Les sections de St Adrien et de Guellec ont demandé un délai jusqu'à dimanche, jour auquel les jeunes gens des deux sections se proposent de tirer au sort pour fournir chacune deux hommes, celle de Créménet doit s'assembler le même jour et tirer au sort pour fournir l'homme qu'elle doit encore. Nous vous prions de nous accorder le nouveau délai".
Le billet noir
Suite du feuilleton dans ce courrier de la municipalité daté Lundi 8 octobre 1792 faisant état du refus de Scaërois tirés au sort de servir dans cette garde nationale.
"Aujourd'hui les jeunes gens de la Section de St Adrien ont tiré au sort avec la plus grande tranquillité Yves Salaun et Bertrand Huiban auxquels le sort est arrivé se rendront à Quimperlé mardi prochain.
Les billets ont été faits ensuite pour les jeunes de Guellec, Bertrand Le Reste, domestique de Bertrand Le Bihan, Officier Municipal de Kernescop a tiré le premier et a eu le billet noir, à peine l’a-t-il vu qu'il a sauté aux cheveux du soussigné secrétaire-greffier de la Municipalité, le Maire et quelques autres personnes présentes ont aussitôt employés leurs bons offices et leurs bras pour empêcher qu'il n'en résultat du mal avait de sortir de la salle ce Bertrand Le Reste a déchiré un arrêté du département qui se trouvait sur la table et a annoncé publiquement qu'il ne manquerait pas de tirer quelqu'un avant de quitter le Bourg.
A la porte de la salle au dehors il a colleté et maltraité le Maire. Mathieu Madic domestique et Corentin David du Coadigou et Henri Madic de Kersalaün se sont joints à ce Bertrand Le Reste, pour railler et maltraiter le Maire auquel ils ont déchiré un gilet de drap neuf qu'il portait, il courait le risque de perdre la vie si Furic et quelques autres particuliers n'avaient accouru à son aide.
Ce jour Charles Le Grill de Tréganan s'est offert volontairement pour le remplacer sur les batteries, Bertrand Le Reste lui a donné une somme à cet effet.
Nous vous prions d'admettre le remplacement et de punir ce Bertrand Le Reste pour voies de fait par lui exercées, pour le même motif, nous indiquons les deux Madic pour servir sur les batteries pour les deux sections de Caradec et de Créménet, que ces troubles ont empêchés de tirer au sort pour fournir encore un homme de levée chacune.
Imprimé de boissons!!!
Nous vous proposons de faire enlever par la Gendarmerie Nationale Bertrand Le Reste et les deux Madic, Bertrand Le Bihan, Officier Municipal qui s'est mal montré dans les premiers troubles, qui ont eu lieu dans cette paroisse, se trouvait imprimé de boissons dans le lieu de nos séances pendant le tirage. Sans cette circonstance, ces événements n'auraient peut-être pas eu lieu entre l'attaque du Secrétaire-Greffier et celle du Maire.
Le tirage a été continué et Vincent Guillerme petit et bossu de Prat Cotter a eu le second billet noir, Si vous jugez à propos de le réformer nous vous proposons de le faire remplacer par Joseph Galven aubergiste en ce bourg qui s'adonne à la boisson. Nous vous indiquons ce bel homme qui a déjà servi.
En ce moment un exprès que nous avions envoyé à la poste vient de nous remettre une lettre de votre part relative à l'organisation de notre Garde Nationale. Ces nouveaux événements empêchent Bernard d'accepter la Commission honorable dont vous venez de le charger.
Nous vous prions de nous envoyer un Commissaire étranger pour cet effet et de nous prévenir à temps de son arrivée ici, pour pouvoir assembler la paroisse".
Ce courrier se termine par une réponse à la lettre de Quimperlé quant à l'interdiction de dire la messe dans les chapelles :"L'abus relatif aux messes qui se disaient dans nos chapelles vient de cesser nous avons eu aujourd'hui et on a annoncé pour l'avenir qu'il y aurait grand-messe au bourg".
(*)Un vaste programme de travaux de fortifications est lancé en 1776 pour protéger le port et l'arsenal de Brest côté terre Ces travaux sont entrepris sur l’ensemble de la presqu’île de Crozon et plus encore sur celle de Roscanvel, les lignes de Quelern constituent l’un des points les plus intéressant des fortifications élaborées pour protéger l’arsenal de Brest .
Recherches faites en l'an 2000 par l'association pour la mise en valeur du patrimoine scaërois