... Grande était l'animation à Coat-Loc'h.
De bon matin le sabotier quitte sa maison de Saint-Guénolé pour se rendre à la forêt. Sa femme d'ailleurs trouvera largement à s'occuper avec la nichée d'enfants, la vache et les deux cochons.
Dans la journée, le sabotier est centré sur la hutte: une rangée de poteaux, une double couche de branchages rembourrés de paille et bien ligotés avec de jeunes branches. Au milieu de la hutte, quelques cailloux, formant le foyer, dans lequel brûlent des copeaux fins. L'ouverture béante au sommet du toit enlève tout risque pour les habitants d'être enfumés.
| Deux couchettes rudimentaires pour passer la nuit
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| | Le foyer de la hutte: lLes sabots sèchent au niveau supérieur. En bas, la soupe mijote. A l'arrière plan une table et ses sièges
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Tout un monde vit de l'arbre : le bûcheron a abattu les hêtres, le seul
arbre à sabots à Coat-Loc’h. Le charretier les a transportés près de la
hutte, les voilà tronçonnés en rondelles d'après la longueur du sabot,
puis fendus en 4 ou 6 quartiers.
| La hutte de Berthelot
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| | Des bucherons à l'œuvre. Jean Fiche de Ty-Gloanec ( 1871-1956) serait à gauche |
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C'est à ce moment que le sabotier se
saisit du bois. Rapidement dégrossi, le quartier de hêtre est taillé à
la hache, puis, avec le paroir, façonné en sabot. Il s'agit maintenant
de creuser ce sabot à la vrille et à la cuillère, de le gratter, de le
lisser. Et cela donne le sabot ordinaire de la région à bout tombant, le
sabot léonard à bride de cuir rembourré, le sabot-botte, au large bout
relevé, que le marin de Concarneau garnira de cuir pour faire des bottes
de mer, les « claques » pour les dames, les petits sabots à brides pour
les jeunes enfants, sans oublier le sabot fantaisie, sculpté, du
dimanche.
Toute la journée la hutte fume
À
midi, le repas est bien chaud : les pommes de terre au lard ont cuit
toute la matinée, à petit feu, dans les copeaux de la hutte. Avec la
soupe auparavant, bien sûr. Et toute la journée la hutte fume, car il
faut sécher les sabots verts. Demain ces sabots, roturiers ou sculptés,
seront entassés dans des charrettes et vendus aux grossistes aux quatre
coins du Finistère.
Le soir l'ouvrier regagne sa maison de
Saint-Guénolé. Pourtant, s'il habite au loin, il reste coucher dans la
hutte, tandis qu'autour du feu lent des copeaux entassés les sabots tout
neufs sèchent.
Combien de sabotiers sont-ils à Coat-Loc’h au début du XXe siècle ? Une cinquantaine, répartis dans une douzaine de huttes.
Comment s'appellent-ils ? Floc'h, Lessard, Berthelot, Bruno, Le Dez, Toulgoat...
| Le hêtre a été tronçonné en rondelles qui ont été taillées en 4 quartiers
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| | Le travail se poursuit dans la hutte
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Le
patron doit avoir l'œil, tout savoir depuis l'achat de l'arbre jusqu'à
la vente du sabot. C'est ainsi qu'en 1912 il paie de 30 F à 40 F le
mètre cube de bois qui lui donnera dans les 75 paires de sabots. Sabots
qu'il compte vendre 1,25 F les ordinaires et 1,50 F les brodés,
c'est-à-dire les sculptés. Il paie ses ouvriers invariablement la moitié
du prix de vente des sabots. L'autre moitié va à l'achat des arbres et
pour son salaire personnel.
En 1918, le « tailleur », c'est-à-dire le
dégrossisseur du sabot est payé 17,50 F à la douzaine, et le « creuseur
» 17,50 F lui aussi, avec en plus leur part de copeaux.
| Le quartier de hêtre est taillé à
la hache (Bruno)
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| | puis le paroir à façonné le sabot (Bruno)
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| Il s'agit maintenant
de creuser ce sabot à la vrille et à la cuillère ( Bruno)
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| | Cela donne le sabot ordinaire de la région à bout tombant (Bruno)
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Tout compte fait, sabotier, métier au travail régulier, n'est pas
tellement mauvais. Aussi le quartier de Saint-Guénolé est bondé. Il
compte d'ailleurs 8 débits de boisson.
Tous les sabotiers de Scaër ne
sont pas dans ce coin. D'autres huttes fument à Kerscoff, à Saint-Paul,
à Crenorien, à Treouzal, à Prat-Cotter... Quand les arbres y seront
devenus sabots, adieu cette hutte.
Tout cela c'était avant hier, avant que le caoutchouc et le plastique ne deviennent rois.
D’après les souvenirs de Louis Le Bas, ancien patron sabotier, qui demeurait Rue C. Guillou , Pors-Carnig. Témoignage recueilli dans les années 60-70.Les anciens Scaërois ont en mémoire le magasin de chaussures Larvor - Le Bas (Sources : association de mise en valeur du patrimoine scaërois).
Photos noir et blanc:documents authentiques de1943, enquêtes du musée national des arts et traditions populaires. Photos couleur de 2015: dans la hutte pédagogique reconstituée près de la maison forestière
Valeur du franc1912 = 3.143 euros ;1918 : 1.74 euros.
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