Mathurin Fiche, éleveur de chevaux

En 1980, M. Mathurin Fiche, 78 ans, de Prat Cotter,apportait son témoignage sur l’élevage des chevaux avant la mécanisation de l'agriculture . Il ne s'agissait point de chevaux de selle mais du vénérable postier breton, une spécialité de son village.

Un pur-sang anglais aux haras

« J'ai toujours gardé la même origine depuis 1933. J'avais acheté 1100 F à l'époque une pouliche sur la mère à Keryélégant... Chez nous, il ne faut pas chercher à utiliser des chevaux trop lourds comme l'Ardennais... On disait que Scaër, Bannalec et Elliant possédaient les meilleurs étalons à la station des haras. Il y a eu un moment jusqu'à 14 étalons à la station de Scaër et même un pur-sang anglais. Maintenant, c'est le camion qui vient à la ferme pour la monte et il envoie deux ou trois étalons. Ce n'est plus possible de mener un cheval sur la route à l'heure actuelle. Autrefois, les gens venaient aux haras soit pour conduire la jument à la monte de 8 h, soit 11 h, soit 16 h. J'ai vu la cour des haras archipleine et même des juments arriver pour la monte de 11 h alors que celle de 8 h n'était pas encore finie ! »
M. Fiche a toujours été passionné par les concours de chevaux. Un diplôme commémoratif du concours de Bannalec en 1936 orne d'ailleurs la cuisine. L'élevage de M. Fiche obtint un premier prix, un troisième prix et un cinquième prix. Le premier prix lui rapporta 1100 F soit le prix d'achat de sa jument « Lilas ». Cette jument vivra 27 ans et M. Fiche en parlait avec un peu de nostalgie dans la voix. « Avec elle, pas besoin de guide, quand on coupait le foin, elle n'écrasait pas la partie non coupée».


Trois chevaux primés au concours de Bannalec, présentés par François Fiche, Mathurin Boulic et Joseph Boëdec, 1936


Un tombereau attend le train à la gare de Scaër, 1943 ( Photo MUCEM, ATP)

 

L'éducation des jeunes

Un des aspects oubliés de la vie rurale est l’apprentissage du poulain : « On l'attachait à côté d'un vieux cheval à la herse canadienne.  Comme cela on pouvait aller plus profond si le jeune voulait aller trop vite. Ensuite, on l'attachait à la charrette avec un vieux devant. Pour la charrue, on ne le mettait pas trop vite, car c'était plus dangereux... Les chevaux étaient plus faciles peut-être qu'aujourd'hui à apprendre car ils vivaient près des gens, on les caressait facilement... allais il y avait aussi des caractères durs.   D’autres refusaient d’'avancer quand on les attachait. Dans les fermes il y avait aussi un limonier : un cheval castré que l’on mettait entre les brancards. Pour les pouliches pleines, c'était une place trop difficile avec les routes défoncées par où on passait. 



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Démonstration de labour à Ty-Allain, 2010
La faucheuse dans un champ de blé à Ty-Allain, 2011


Vers la boucherie ou le Japon

M. Fiche signalait que dans une ferme de Prat-Cotter il y eut jusqu'à 22 chevaux. Quatre ou cinq travaillaient, les autres étaient destinés à la boucherie. « Les marchands de Landivisiau venaient chercher les poulains pour l'Italie ». En 1980, c’étaient les Japonais qui s'intéressaient au postier breton.
M. Fiche se demandait aussi si pour certains légers travaux, binage, abreuver les bêtes... un cheval ne serait pas plus économique qu'un tracteur. Une idée qui a été reprise depuis jusque dans les vignobles.

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