Une lettre de Tourc'h
À propos des
combats de Kernabat-Quillien, un habitant du quartier nous a communiqué une lettre écrite le
19 juillet 44 par Michel Quéméré de Kervizien en Tourc’h à sa « chère Jeanne »
à Ploërmel. Un document inédit, écrit dans un style recherché, riche en détails
parfois morbides
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Première page de cette lettre |
Puis il
narre avec force détails les combats de Kernabat-Quillien du samedi 15 juillet
où la nuit précédente des avions avaient
largués des caisses de munitions : « Les
Allemands avaient-ils perçus les signaux ou avaient-ils été renseignés. Tous
arrivaient à la curée » 200 jeunes gens du pays « qui n’avaient jamais manœuvré
la moindre arme de guerre » se
replièrent « en sautant talus et rivières de Kernabat vers Guénégant-Quillien
en Tourc’h et vers Coray ». Il note 15 à 19 morts : « criblés de cartouches :
elles tombaient en pluie quand on soulevait les corps ». D’autres résistants tombèrent « en sautant talus et rivières de Kernabat vers Guénégant-Quillien en Tourc’h et vers Coray » selon la lettre de Michel.
Le soir venu, Michel
observe que les fermes de Kernabat brûlaient.
Ce document
historique abondent en détails sur les obsèques « Lundi et hier, Tourc’h a enterré 6 cadavres,
les autres qui étaient tombés à Scaër, ont été jetés dans une fosse commune ».
Lundi matin, trois à la fois. Personne derrière les cercueils, juste les
proches parents : une douzaine ; un simple Libera. Le soir à 7 heures, on avait
découvert deux autres morts ; même cérémonie. Mardi matin, encore un de trouvé
: son frère avait été enterré la veille ( NDLR : il s’agissait des frères
Jacob, de Coray). Une famille de Fouesnant est venu le 16 exhumer leur enfant
unique et l’ont emporté avec eux. Michel site parmi les morts aussi René Mao,
réfractaire au STO depuis 1942, qui vivait caché chez sa tante Louise Caraër» .
Il termine sa lettre « Après de pareils jours, on a le cerveau vide
! On est obsédé par tous ses ces visions... Comme la guerre est laide »
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A Kernabat , les résistants décédés furent enterrés provisoirement |
Le témoignage de Charles Laz
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Témoignage recueilli le 9 juillet 2003 |
Voici le récit de Charles Laz :"J'avais 18 ans en 1944. J'étais chargé d'envoyer les cercueils pour les fusillés de Kernabat. J’avais 17 cercueils faits par les menuisiers de Scaër. Personnellement j'ai participé à la construction de trois cercueils rapidement fait en bois blanc sans teinture, vu l'urgence, chez mon patron Louis Derrien Arrivé sur les lieux à Kernabat la maison était incendiée par les Allemands. Qui je rencontre ? mon oncle Louis Le Bihan, maire de Coray , venu constater et identifier un patriote le long d'un talus encore possesseur d'un imprimé sur le mécanisme des armes, de certaines armes parachutées. J’ai conservé cet imprimé quelques temps puis je m'en suis débarrassé par peur de représailles
Un cercueil a servi pour le patriote de Coray mais, surprise, les autres corps avaient été repris par leur famille. J'ai donc retourné mes cercueils à Scaër pour les remettre à chaque menuisier correspondant. Pendant mon retour, j'ai croisé un camion d’Allemands qui remontait sans doute sur les lieux. Certaines personnes au bord de la route faisaient leur signe de croix pensant sans doute que les cercueils étaient occupés " .
NB : Charles Laz n'apportait que 17 cercueils. La 18e victime, Pierre Cabellic blessé à Kernabat, décéda à l'hôpital.