La vie des écoliers avant 1900

 

 En 1969, c’était le début des magnétophones à cassettes. Les prêtres de la paroisse de Guiscriff enregistrèrent trois anciens de plus de 80 ans pour recueillir leur témoignage sur leur enfance. Des extraits furent publiés dans « Kleïer Ma bro », le bulletin paroissial sur le bourg, l'église, la surélévation du clocher, les mariages. Voici quelques extraits concernant  la vie des écoliers


-Vous êtes bien sûr allés à l'école comme tout le monde point mais il est évident qu'en 1890, les choses ne se passaient pas comme maintenant. À quel âge commencer la vie scolaire ? 

-Cela dépendait d'un certain nombre de circonstances. Il y avait d'abord une question de distance. Ceux du bourg et des environs commencer à 7 ou 8 ans. Les autres attendaient parfois 10 ans. Moi je venais de Kerbrunec. La route n'existait pas encore, elle n'a été construite que vers 1900. Pour venir au bourg, c'était tout un sport surtout en hiver... On chaussait ses sabots de bois et clic-clac on fonçait à travers champ, par-dessus les talus ou dans les mauvais chemins. On arrivait en classe crotté et trempé comme si on avait passé la nuit dans un trou de boue. L'été, c'était plus facile souvent on allait pieds nus.

Parfois les aînés de la famille devaient attendre quelques années pour venir à l'école. Ils étaient obligés de rester garder frères et sœurs et encore quand ils venaient, ce n'était pas tous les jours. La doyenne de la commune me racontait que ses parents la laissait venir 3 jours par semaine seulement. Et au bout de 18 mois à 2 ans, père et mère jugeaient qu'on en savait assez.Les enfants restaient alors à la maison. Ceci explique que beaucoup d'anciens ne parlent guère le français.

-Combien y avait-il d'écoles à l'époque ?


L'école des garçons se trouvait à proximité du presbytère.
C'est le site de l'actuelle médiathèque.

Le "couvent", c'est à dire l'école des filles (état actuel)


- Il y avait le couvent pour les filles et l'école publique pour les garçons. L'école publique se trouvait près du presbytère actuel. La mairie était au rez-de-chaussée et les classes à l'étage. En 1893-1895, le directeur s'appelait monsieur Simon. Sa femme s'occupait de la petite classe et un adjoint monsieur Pautremat, de la classe intermédiaire. Au début il n'y avait pas de cour : la récréation se passait sur la petite place, dans les rues ou les prairies d'à côté. 

-Ce n'était pas trop compliqué pour faire rentrer tout le monde ? 

-Parfois si. Certains en profitaient pour aller chercher des nids.Mais on arrivait quand même à peu près tous au coup de sifflet. 

-La cantine n'existait pas sans doute ?

-Non. Certains faisaient tremper leur soupe dans une maison du bourg. Les autres mangeaient leur morceau de pain de seigle avec un bout de lard.

- On ne faisait pas de pain blanc ?

-Si, mais très peu .Le boulanger du bourg monsieur Le Ny, qui habitait une petite maison derrière le café Bruno actuel , il n'avait pas beaucoup de clients car chaque village possédait son four où l'on cuisait du pain de seigle.

-À l'école, les conditions devaient être assez différentes de celle de maintenant ? 

-Forcément, on était plus pauvre. L'hiver, le poêle fumait passablement. On avait bien des livres et des cahiers, mais pas aussi beaux que ceux d'aujourd'hui. Quant aux stylos à bille, ils ne sont arrivés que 50 ans plus tard. 

-Le certificat d'étude mettait un point final à ces quelques années d'école ?

-Oui, pour les rares élèves qui poursuivaient jusqu'au bout et n'abandonnaient pas en chemin. Ce jour-là l'instituteur louait un char à banc pour transporter son monde au Faouët. On partait le matin et on revenait à la nuit. L'année où j'ai passé le mien, l'école présentait six  candidats. Trois furent reçus mais les trois candidats de Lanvénégen furent collés. Vous pensez si on était fier !

Quelques-uns continuaient ensuite jusqu'au brevet élémentaire mais c'était un tout petit nombre...