Dans son édition de janvier 1967, le journal paroissial " Kannadig Scaër"(*) a interviewé trois Scaërois sur le thème du commerce et de l'artisanat. Voici l'essentiel de cette radioscopie que l'on pourra rapprocher de la situation actuelle.
L’artisanat à Scaër, comment se présente-t-il actuellement ?
Comme partout ailleurs, l'artisanat chez nous évolue. Certaines professions traditionnelles n'existent pratiquement plus. Ainsi, la botte de caoutchouc a tué les sabotiers ; les tailleurs de pierre ainsi que les chapeliers de Pors-Carnig ne sont plus qu'un souvenir folklorique. Les artisans branchés presque uniquement sur le monde rural — forgerons, charrons, selliers - - sont parmi les plus touchés. Beaucoup moins de tailleurs d'habits et de cordonniers qu'autrefois... la confection est là. Nous n'avons plus de gros atelier comme celui-là qui, au début du siècle, comptait 28 ouvriers, menuisiers, charpentiers, ébénistes. Pourtant, en 1967, les artisans restent nombreux à Scaër, spécialement dans le domaine de la construction. Ils sont plus dispersés ; on en trouve aux quatre coins de la commune. Un exemple : on compte une dizaine de patrons-peintres.
Et les commerçants ?
Actuellement Scaër compte environ 150 commerces nous n'y englobons pas les bistrots. Chiffre sensiblement égal à celui d'autrefois. Ah ! bien sûr, libre à chacun de regretter le commerce d'autrefois, quand chaque famille rurale avait sa maison au bourg, pour « descendre ». Sa maison avec écurie, remise et bol de café. Il existait alors beaucoup de liens entre commerçants et clients : tel boulanger fut parrain 30 fois et telle, bouchère marraine 38 fois. À cette époque-là déjà, de grands cahiers pour noter les dettes des clients. Maintenant cette clientèle familiale diminue fortement. Actuellement c'est de la compétition: le client se considère libre dans ses achats : il va là où bon lui semble. Et puis l'œil du fisc se fait de plus en plus perçant...
|
|
Que faites-vous, face au client de 1967 ?
Nous tâchons de nous organiser. Cela a commencé il y a une dizaine d'années. Au début, simplement une « Union Locale des Petites et Moyennes Entreprises » à but défensif au point de vue impôts. Puis nous nous sommes dit : II faut bâtir du positif, faire du commerce scaërois quelque chose de valable en cherchant à éduquer commerçants et clientèle. En 1960, le « Groupement Commercial de Scaër » a vu le jour. Une centaine d'artisans et commerçants en font partie. Bureau. -- Président : Marcel Jamet ; Vice-Président : Roger Galant ; Secrétaire : Charly Le Gall ; Trésorier : Hervé Le Berre.
Nous nous réunissons cinq ou six fois par an ; plus souvent s'il y a des problèmes majeurs et nous demeurons en contact avec la municipalité. Notre grand objectif est d'essayer de former le commerçant et la clientèle. Persuader le commerçant qu'il a beaucoup à apprendre, qu'il lui est nécessaire de se tenir au courant, que l'isolé n'a plus de chance de survie, que son client de 1967 — qui achète surtout avec les yeux -est très différent de celui de 1920, etc.
Qu'attendez-vous de votre clientèle ?
D'abord une certaine fidélité : nous sommes très sensibles à cela et vraiment peines quand on nous laisse « tomber ». Ensuite, un minimum de compréhension ; certains clients sont vraiment trop exigeants. Nous demandons aussi d'être payés dès que possible. De nombreuses factures très en retard font blanchir nos cheveux. Enfin, que le client sache qu'il y a des heures de fermeture même chez les commerçants. Qu'on nous laisse manger en paix et avoir un minimum de vie de famille.
Avez-vous d'autres réalisations a votre actif ?
Nous organisons de temps en temps des manifestations commerciales comme celle de Noël 1966 qui nous a permis d'écouler environ 50 000 tickets.... Nous sommes les artisans de la Mi-Carême -- que nous espérons revoir en 1967. Nous demeurons optimistes, mais à condition de retrousser ses manches !
(*) c'est à dire : le petit messager scaërois.