Aujourd’hui la rubrique faits divers des journaux abondent en affaires de drogue, de conduite sans permis, d’accidents de la route, de violences conjugales ou sexuelles… Il y a un siècle, les journalistes relataient d’autres événements locaux avec une plume souvent ironique, parfois condescendante qui serait censurée aujourd'hui au nom du politiquement correct.
Qu’on en juge par ce florilège d’incidents qui se sont déroulés à Scaër en 1922 de l’Union agricole et maritime du Finistère, organe des intérêts politiques et agricoles de l'arrondissement de Quimperlé, lancé par James Monjaret de Kerjégu.
Janvier
Vagabondage. Louis-Joseph Duigou. 65 ans, a été arrêté à Scaër. A peine sorti de la Maison d'arrêt de Quimper où il avait purgé trois mois. Il n'a ni domicile fixe, ni envie d'en avoir.
Attelé» d’un cheval pardi ! (avez-vous remarqué combien une voiture a l'air bête, les brancards en l'air et le cul au sol ?) la charrette de Bertrand se trouvait, le 7 janvier, à 18 h. 20, près de Minez Groasne, très fière de son attitude. La lumière, qu’elle n'avait pas, passait au second rang de ses préoccupations de voiture. Le gendarme passant reclassa de nouveau ses soucis, et pour de bon, cette fois. Lumière avant tout.
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Mars
Ivrogne écrasé. Le lundi 13 mars, dans la soirée, à 200 mètres de Kerninon, et à 2 kilomètres du bourg, l'auto conduit par Pierre Dérout, 19 ans, employé de la maison Mao et Le Gain, livreur à Rosporden, a passé sur le corps du sieur Louis Le Bec, 70 ans, de Kergoaler, en Scaër. La victime avait quitté le bourg, vers 17 h., en complet état d'ébriété, dans la voiture de son cousin Le Bec, du Cleuziou qui le mena jusqu'au Pont-Ledan. Là il descendit et entra au débit Moysan, où on lui refusa à boire. Il resta cependant là 20 minutes, puis reprenant la route de Scaër, ce fut au débit Galland qu'il voulut porter sa clientèle, offrant même du cidre à vendre. Là aussi, il fut éconduit. C'est peu e temps après qu'il dut s'affaler au milieu de la route.
L'auto, avait été louée par les marchands de chevaux MM. Delmars et Delpeyroux, tous deux de la Dordogne et revenant de la foire de Carhaix. On faisait du 23 à l'heure, et le conducteur prit cet homme étendu pour du crottin au milieu de la chaussée. Ce n’est qu'une fois le malheur arrivé que l'on s'aperçut qu'on avait affaire à un être humain. Il, était trop tard I
Dérout vint avertir, la gendarmerie, laissant là corps et l'auto à la garde de ses compagnons. Le Dr Chapel ne put que constater le décès.
Tapage nocturne. Trois jeunes gens, Jean-Louis, Jean-Marie, tous deux du Coadri, et Jean, de Trévalot, faisaient du boucan dans la rue principale de Scaër, le 14 mars, à minuit 35. Ils poussaient des cris obscènes. Ils poussent maintenant des gémissements.
Le Chien de Kerascoët circulait, comme s'il n'y eut pas eu d'arrêté préfectoral, le 23 février, à 11 h. On ne voyait que lui, sur la place du bourg. On a vu le nom de son maître sur le calepin du gendarme.
Mai
Chez les bouchers. M. le Maire de Scaër ayant pris, à la date du 28 mars 1922, un arrêté, approuvé par M. le Préfet, réglementant le prix de la viande de toutes catégories vendue au détail, la gendarmerie s'est, dans la matinée du samedi 28 avril, transportée chez les bouchers.
Chez Mme veuve Goaracher le 'prix du kilo de bœuf est de 0 fr. 50 supérieur à celui fixé ; chez M. Kersulec, également 0 fr. 60 d'e plus par kilo de veau ; chez M. François Croissant, idem : chez M, Henri Toupin de 0 fr 60. Tous prétendent que l'observation de l'arrêté leur ferait perdre tout gain, et que la majoration qu’il se permettent ne leur laisse qu'un petit bénéfice. En achetant le veau à 1 fr. 50 le demi-kilo sur pied, déclare M. Croissant,il faut vendre 3 fr. le même poids de viande nette. Sa bonne, Mlle Cozic, à l'annonce du procès-verbal qui frappait son maître, comme ses concurrents, observe ; « Vous pouvez nous 'dresser procès-verbal, mais il n’en sera tenu aucun compte » Ne dirait-on pas, vraiment, que les arrêtés sont faits pour qu'on s'assoit dessus? En outre, Mme Goaracher, qui n'avait pas affiché ses prix, a un procès-verbal, ainsi que M. Croissant.
A Stang Audren. Au débit Vigouroux, Ollivier, a continué une belle cuite commencée ailleurs le 7 mai. Comme il était 22 h. 50, Olllvier a eu son petit procès pour Ivresse et Vigouroux deux autres ; un pour fermeture tardive et l'autre pour avoir servi à boire à un ivrogne.
Une pocharde. Marie criait et gesticulait, le 7 mal, à 21 heures dans la rue principale de SCAER. On l'a remisé au violon.
La bouchère craintive. Rosine n'affiche pas le prix de la viande dans sa boucherie parce qu'elle redoute que le gendarme voyant ses prix supérieurs à ceux fixés par M.le maire de Scaër, en date du 23 août 1919 ne dresse procès-verbal à son époux. Celui-ci hélas n'a point évité le p. v.
Juillet
Arrestation de deux Crozonnais. Deux ouvriers carriers Louis et Guillaume Jannon, 60 et 48 ans, sans domicile fixe, ont terminé le périple qu’ils accomplissaient en Basse Bretagne, ayant été sommés par la gendarmerie de venir se reposer à la caserne.
Vol de pommes de terre. M. Jean Duigou, bûcheron à Penkernavellou, en Scaër, avait semé des pommes de terre dans un champ loué à Mme Presse, du bourg. Il s’aperçut ces Jours-ci, que son champ avait été visité et des tubercules enlevés. Il a porté plainte à la gendarmerie qui a ouvert une enquête. Ses soupçons se porteraient sur la femme Navellou Jean, du bourg. Celle-ci questionnée nie formellement.
Ce n’est rien...Une femme qui boit. La Vve M... n'a que 34 ans. Elle se console de son veuvage en caressant la bouteille. Le 21 juin à 20 h. 30, épuisée de ses accolades, elle chancelait dans «la rue principale du bourg. Les gendarmes l'étayèrent.
Éclairage. Pas de phare à la bécane de Jean, domestique agricole à Kergoaler. Le 16 juillet, à 23 h 30, il en vit le désavantage, près de Boudilin. Avant lui, à Stang-Audren, Barthélémy, apprenti charpentier, avait déjà fait pour le même motif, une triste expérience.
Août
Ivresse. Olivier Guillou, 27 ans, maçon, fut trouvé couché ivre-mort,à l'entrée du bourg, le 16 Juillet, On l'a embastillé !
Septembre
Chien errant. Le chien de Joseph contrevient à l’arrêté préfectoral du 27 Juillet 1922. il en apprendra le respect. Chien noir... caillou noir, mauvaise journée, et m… ! disait le boulanger Émile, quand son chien lui rapporta un p.-v., le 23 août à 13 heures.
Novembre :
Infraction à la police des cabarets. Berthelot Julien, débitant à Coat-Loch n’avait pu, le 32 septembre, exhiber aux gendarmes, son récépissé d'ouverture de débit en outre le prix des consommations et la loi sur l'ivresse n'étaient pas affichés, deux amendes de 16 fr. avec sursis pour les deux délits d'affichage et 5 fr. pour contravention à la loi du 1er octobre 1917.
Guillaume, Restambern, en Scaër, vint à la foire, le 8 novembre, où il se procura, avec maints autres délices, les plaisirs raffinés d'une cuite, On le mit tout bouillant (berô) a rafraîchir en cave...
Décembre
Vagabondage. Kerneis François, 59 ans, sans domicile fixe, surpris le 4 décembre à Scaër, en état de vagabondage et de mendicité se voit condamner à 15 jours de prison.
Dans les vignes. René, cultivateur à Ty-Motter-Vian, dimanche 16 décembre, vers 17 heures, se trouvait dans les rues de Scaër, dans un tel état d'ébriété qu'il se tenait à peine debout. Deux gendarmes complaisants lui procurèrent un gîte pour passer la nuit en le gratifiant du procès-verbal traditionnel.
Chienne suspecte. Dans la nuit du 28 au 29 novembre, une chienne sous poil blanc, moucheté marron, a quitté de chez son patron, M. Henri Burel, photographe au bourg.
Ce dernier l’a aperçue pour la dernière fois dans la soirée du 28 novembre, près de chez lui. Il l’a appelée mais, contrairement à son habitude, au lieu d'approcher, elle s'est enfuie et aurait mordu, au bourg, deux ou trois autres chiens. Depuis elle n'a plus reparu. Son propriétaire la considérant comme suspecte de rage a prévenu la gendarmerie. A son départ, elle avait un collier portant le nom et l'adresse de son maître. M. Le Maire a pris immédiatement un arrêté concernant la circulation des chiens.
Vol de linge. Dans la nuit du 4 au 5 courant une certaine quantité de linge tout mouillé et en partie lavé avait été laissé, par Mme Pierre Bourhis, de Kerbezellec, sur le bord du lavoir à 50 m. de la ferme. Cette dame et sa bonne, Anne Tudal, ont relevé des traces de gros souliers et de galoches, indiquant trois personnes. A 300 mètres, l'un des voleurs dut bifurquer vers Le Guellec, mais,il ne trouva rien au lavoir de M. Monfort. Les chiens des deux villages n'ont pas aboyé. Le préjudice causé est de 140 francs.
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