Enfouissement des déchets ultimes . Deux projets retoqués



En 1985, la société Grandjouan envisagea de créer une décharge à Kerménez, aux limites de Leuhan-Scaër. Un comité de défense décidé réussit à infléchir la décision préfectorale : les premières analyses de sol considéraient en effet ce site comme apte à recevoir des déchets.
Le même scénario refait surface en 1991. En vue de stocker cendres et mâchefers issus de l'usine d'incinération de Concarneau, mise en service en 1989, le SICOM des ordures ménagères (ancêtre du Valcor) recherchait sur le Sud-Est du département un site susceptible de devenir « centre d’enfouissement technique  de classe 1 » pour y stocker cendres et mâchefer.
Plusieurs critères initiaux étaient retenus pour définir plusieurs catégories de sites : absence d' habitations proches, occupation des sols, nature du   sous-sol, perméabilité...

 

Kerménez( à gauche) et  Le Miné ( à droite) furent tour à tour pressentis pour accueillir une décharge


Photo du mois de décembre 1991

 

Une étude tronquée

Deux sites d'intérêt n° 1 furent retenus à Elliant et Scaër. Sur notre commune, 80 ha compris entre Cleumerrien-Loge Prince-Kerninon attirèrent l’attention des instigateurs du projet. Ils avaient retenu un terrain peu fertile, occupés par des prairies et des cultures., au sous-sol schisteux avec des altérations argileuses, L'accès était facile. Le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) effectua en juillet 91 deux sondages aléatoires sur le site potentiel : on trouvait de l'eau à 9,60 m, juste au-dessous des 9 mètres profondeur minimale requise pour ce type d’installation.
Ce projet suscita d’emblée maintes objections : la période de référence n'est pas celle des fortes eaux. Paroles de riverain «Si le Miné-Wern-Zu était un terrain sec, cela se saurait ! Ce ne sont pas les bureaucrates qui n'ont jamais vu ces champs en hiver qui peuvent dire quelque chose » . ,
 De plus, ce sondage intervenait après trois années de sécheresse. Un agriculteur avait fait creuser un puits pour abreuver ses bovins: au mois de décembre 1991, l'eau affleurait la surface du sol. Enfin, à partir de deux sondages, on ne pouvait généraliser les résultats sur 80 ha ! Les riverains du Miné-Wern-Zu connaissaient bien l'état des lieux à la fin de l'hiver : les eaux stagnent en surface une fois que le sous-sol a fait le plein. Le bon sens paysan s’opposait à l’installation d’une décharge s'installer dans un site si humide qu’il y a des tourbières : « Durant la guerre, on tirait de la tourbe du Miné-Wern-Zu pour les chaudières de Cascadec  ».

 

1 : Kerménez;2: Miné Wern Zu  (dossier PLU 2019)

 Comité de vigilance puis de défense

Un comité de vigilance puis de défense comprenant en majorité des riverains de la zone concerné vit le jour craignant une pollution des eaux car les résidus contenaient des métaux.  Il mit en avant les arguments suivants:

-Les quantités de cuivre, nickel, zinc, cadmium, cobalts susceptibles d'être dissoutes étaient conformes aux normes selon le dossier présenté mais les opposants mettaient doute l'exactitude de ces analyses. Pour le plomb, le mercure, le chrome, il n'en était certainement pas  pas de même. " Le Ph de ces cendres est élevé : elles devaient être conservées en milieu basique. Or, en Bretagne, les eaux sont plutôt acides".
 -Plusieurs usines agroalimentaires, des papeteries fonctionnaient en aval sur l’Isole. « les industriels doivent travailler des matières premières avec une eau de très bonne qualité ». Ajoutons que le captage d'eau de Guiscriff se trouve à Bonizac, à 1 km en aval du site et que la présence de l'aérodrome de Keranna créait une servitude. Créer une décharge  dans le Miné-Wern Zu n'était vraiment pas une bonne idée.
Des banderoles furent placées en bordure de la route de Gourin : « Non à la décharge... Non aux déchets de Concarneau, non à la pollution de l'Isole». Le comité de défense demanda des compléments d’étude. Il se constitua en décembre 1992 en « Comité de  défense   du   bassin-versant   de l'Isole » déterminé à lutter non seulement contre le projet de décharge mais contre toutes les nuisances susceptibles de bouleverser l'équilibre écologique du bassin versant de l'Isole. Pour mémoire,Il était composé de huit membres: président, Lili Le Meur, Kerninon; vice-présidents, Pierre Hamon, Kerfring, et Jean-Pierre Lann, Kerlann. Secrétaires : Gaby Le Meur, Kerninon, et Alain Guillou, Pont-Lédan. Trésorière : Mme Mercier, Miné St-David; adjoint, René Hervé, Cleumerrien.

Comme à Kernévez  la détermination des riverains, relayés par des élus, incita le SICOM à  explorer d’autres pistes. Aujourd’hui , les mâchefers  sont valorisés en sous-couche routière. Quant aux Refioms, les résidus d'épuration des fumées d'incinération des ordures ménagères, les fameuses « cendres toxiques », ils sont enfouis, après stabilisation, en installation de stockage de déchets dangereux à  Changé près de Laval.

Mais les potentialités des sites de Kerménez et  de Miné Wern Zu  revinrent au devant de l'actualité  au début du XXIe siècle avec des projets de parcs éoliens. Malgré  l'opposition de riverains, quatre éoliennes ont été érigées à Merdy, au sud de Kerménez.  Le Miné Wern Zu aurait pu aussi  être retenu comme site éolien si ce n'était la présence à proximité de l'aérodrome.

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