Pierre Salaün a été maire de la commune de 1945 à 1969. Nous l’avions rencontré en 1979 à Kergaouen, où il passe sa retraite. Âgé alors de 72 ans, il conservait une excellente mémoire et la même foi dans les idéaux qui l'avaient guidé durant sa carrière.
Un engagement syndical précoce
Après avoir failli entrer à l'Ecole normale, Pierre. Salaun est devenu forgeron de campagne à l'issue de sa scolarité. En 1929, il travaille comme ajusteur-outilleur chez Renault et participe dès cette époque aux activités de la C.G.T.U. A partir de1930, il travaille à Cascadec, jusqu'en 38, où il est renvoyé pour fait de grève. Il fait une tentative à l'arsenal de Brest, effectue la traversée de l'Atlantique en tant que mécanicien. Juste avant la guerre, il deviendra ajusteur d'étude dans l'aviation. A la Libération, il travaillera de nouveau à Cascadec et jusqu'à l'âge de la retraite.
Durant cette vie de travail, il s'est toujours passionné pour la défense de ses idéaux au sein de la C.G.T.U., dont il fut secrétaire de 36 à 47. Il représenta même ce syndicat au comité départemental de la Libération en 1944 en tant que vice-président.
24 ans à la tête de la commune
C'est à la Libération que commencèrent ses fonctions électives à la tête de la commune. « Je suis rentré des camps en août 44 et suis devenu permanent de l'Union départementale. À la fin de la guerre, un comité de Libération fut mis en place à Scaër avec pour président René Carer. Une première élection municipale eut lieu vers mars, avant le retour des prisonniers. Une seconde élection se déroula trois mois plus tard. Et c'est à ce moment que j'ai été élu maire sur une liste composée de communistes, de socialistes et de résistants républicains. Mon adjoint était M. Guernic, un socialiste».
Le premier grand travail du mandat de M. Salaun fut l'électrification de la commune. Seul le bourg profitait du courant produit par M. Ollivier (centrale électrique à Meil Pont et au bourg). Les fils électriques en aluminium naviguaient de cheminée en cheminée. Quelques-unes des potences supportant ces fils sont encore visibles sur le flanc des cheminées des vieilles maisons. Après la nationalisation et la constitution d' E.D.F., toute cette installation fut refaite.
Vestige du réseau électrique des années 30 |
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« II fallait aussi refaire l'école des garçons qui était vétusté et qui ne correspondait plus à la population scolaire ». Cette école de garçons, centenaire, se trouvait à l'emplacement de l'actuelle poste. Les travaux pour la construction de ce que l'on appelle aujourd'hui le groupe scolaire Joliot-Curie, commencèrent en 1952 et l'école s'ouvrit en 55. L'installation électrique fut le fait d'artisans locaux. « Il y avait une salle des fêtes prévue au-dessus du réfectoire de l'école primaire. L'achat du matériel nécessaire aux projections fut demandé. Il y avait une scène, des salles pour l'habillage et le maquillage pour le théâtre ». Cette salle ne fut jamais achevé car situé dans une enceinte scolaire. Elle servit d'atelier municipal. Avant la fin de son mandat, sera aussi édifié l'école des filles, actuellement collège (1966). C'était un bâtiment de type Pailleron qu'il a fallu remplacer quelques années plus tard : « A l'époque, j'avais émis des réserves sur la construction des bâtiments ».
Au milieu des années 60, la commune fit encore construire le stade municipal de Gouriger qui porte le nom de Pierre Salaün.
« Nous avons également commencé les antennes routières menant à Scaër, en prévision d'un désenclavement de toutes les fermes, un peu comme une toile d'araignée ».
Le conseil municipal a des pouvoirs limités
Retiré de la vie publique, Pierre Salaün occupait sa retraite par la lecture d’ouvrages sur les mouvements ouvriers. Il évoquait la vie politique en général : « Les électeurs font confiance aux plus riches qu'eux », ou encore : « Le fascisme, si hélas il revenait, pourrait avoir un autre visage que celui de Hitler... » .
Ses réflexions sur les élus locaux : « Les maires font ce qu'ils peuvent. Tout ne dépend pas d'eux : leur pouvoir est limité. Les difficultés sont les mêmes que lorsque j'étais maire. L'État laisse de plus en plus de charges au contribuable local. L'État se décharge, par exemple, sur les chemins. Les aides de l'État ont diminué. Un bon maire doit avoir beaucoup de patience. Et moi, je ne l’étais pas trop patient, c'était mon grand défaut. Un bon maire doit aussi bien connaître sa commune. L'initiative personnelle est aussi nécessaire : il faut que les autres conseillers prennent leurs responsabilités, au sein des commissions par exemple ».
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