Ancien haras. Des chevaux scaërois pour l’armée

Les Scaërois d'origine âgés de plus de 60 ans ont peut-être le souvenir des dernières années de la station de monte des Haras d’Hennebont hébergée  près du cimetière jusque vers 1980. Après la seconde guerre mondiale, les derniers éleveurs de chevaux de trait  de la commune y amenaient leur jument dont le poulain était, soit vendu pour la boucherie, soit éduqué pour tracter charrue ou charrette. Avant 1940,  en outre, les éleveurs de chevaux scaërois « assurait le recrutement d'une branche essentielle de la Défense Nationale ». C’est-à-dire qu’ils fournissaient l’armée en chevaux destinés à être montés par les officiers ou utilisés pour trainer pièces d'artillerie et fourgons militaires.


Les écuries du haras ont connu leur heure de gloire à l'époque où l'armée utilisait des chevaux de trait.
Vu la dimension de la porte à l'origine, les cavaliers pouvaient y entrer sans descendre de leur monture

Une bourgade proprette

« Scaër, la station de tête du haras d'Hennebont, est un chef-lieu de canton du Finistère : il a hérité les prérogatives jadis dévolues au haras des Salles, recueillies dans la suite par Langonnet, jusques et y compris celles qui avaient trait à l'initiative privée… Pays quelconque, bourgade proprette, mais sans note bien spéciale, un élevage sans caractère particulier. Il faut tout l'attrait d'une station d'étalons hors de pair pour retenir à Scaër notre attention » C’est ainsi qu’en 1908 le comte Henri de Robien présentait les haras de Scaër dans un ouvrage consacré au métissage entre les étalons Norfolk et les juments du terroir.

Il ajoute que cet établissement doit sa réputation à la famille de Kerjégu : « La station d'étalons, confortablement installée dans les dépendances de la propriété d'un membre du Conseil supérieur des haras, député, président du Conseil Général du Finistère, se ressent tout particulièrement de ce voisinage. M. de Kerjégu a donné des preuves de l'intérêt qu'il porte à l'élevage de Cornouaille »

Quatorze étalons en 1908

Cet ouvrage attire l’attention sur l'étalon postier Bonheur : « Bonheur est un Norfolk-Breton bon teint qui mérite qu'on lui consacre quelques lignes. De robe rouan aubère : son père The General, Norfolk anglais ; sa mère, une fille de Kirsch» .



Bonheur, l'étalon star pur sang 


Deux petits fils de Corlay, étalon réputé, en service à la station de Scaër en 1908

Dans son étude , il ajoute que  la station de Scaër comporte quatorze étalons : six Norfolk anglais, cinq Norfolk bretons, deux trotteurs normands, un pur-sang. 

 « Ils sont tous d'un bon choix, mais le lot des Norfolk anglais est particulièrement trié sur le volet... La station est aussi remarquable par la qualité que par le nombre ». Deux magnifiques hackneys, « Cup Bearer » et « St Donnats » ont attiré son attention : « je leur souhaiterais une taille plus réduite.  La taille de l'ancien type voisinait avec 1,56 mètre, la taille pratique pour le cheval en vue de la traction normale des pièces modernes d’artillerie» . Norfolk et Hackney étaient des races de chevaux " carrossiers", c'est-à-dire des chevaux de trait . Le Norfolk était aussi un cheval de selle.

D'interminables chemins creux

M. De Robien remarque que l’élevage des chevaux «  est disséminé dans des fermes, d'un accès le plus souvent difficile, à travers d'interminables chemins creux, où, à l'ombre de hauts talus plantés, flaques d'eau et ornières rendent, de par l'insouciance des riverains, la circulation difficile » .


Il déplore  certains métissages entre les chevaux de race  et les juments du terroir : leur union «  imposée sans discernement entraîneront des éclosions malencontreuses. .. J'ai déjà laissé entendre que la jumenterie strictement locale ne se montre pas tout à fait à la hauteur des sires de Scaër. Cet écueil n'est pas isolé dans le Sud-Finistère, où l'éleveur a besoin de compléter son éducation hippique. Cet éleveur, en associant des poulinières, le fait d'ordinaire sans aucun discernement.  Dans la région de Scaër, où il y a pléthore d'étalons, il n'est pas rare de voir une poulinière quelconque utiliser les services successifs d'un pur-sang, d'un trotteur, d'un Norfolk. »

Sources : Norfolk-Breton . Au pays de Cornouaille , Henry De Robien - Gallica.

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